Un nouveau départ pour la Guinée
- Par Administrateur ANG
- Le 20/10/2015 à 13:29
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Le pire était attendu, à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle en Guinée le 11 octobre. Mais les électeurs se sont massivement rendus aux urnes dans le calme, montrant ainsi une envie de démocratie et de « normalité » politique après des décennies tragiques.
Pendant longtemps, la Guinée a été la risée de bon nombre d’analystes, pointée du doigt comme la dernière de la classe dans nombre de domaines. Les politiciens du pays ont attisé le feu de la division ethnique. Ils ont dépossédé leurs compatriotes de leur dignité, de leur histoire qui devrait rester dans la conscience collective en Afrique.
Dans le combat de l’Afrique contre le colonialisme, la Guinée fut à l’avant-garde, avec ce « non » retentissant à de Gaulle en 1958. Ce fut d’ailleurs le début d’une longue série de soucis pour le pays. Quel peuple africain a autant souffert que la Guinée ? Elle a subi en cinquante ans la paranoïa destructrice de Sékou Touré, l’autoritarisme désinvolte de Lansana Conté et la comédie tragique de Moussa Dadis Camara. Des horreurs comme celle de la terrifiante « diète noire » dans les cellules de la prison politiques du camp Boiro sous Sékou Touré, du massacre de plus 150 opposants le 28 septembre 2009 ou encore des tragédies comme l’épidémie d’Ebola, avec ses 2 300 morts, jalonnent l’histoire du pays.
Confiance à l’égard de la politique
Aujourd’hui, les Guinéens sont assis sur une mine de richesses naturelles tout en étant dépourvus du minimum : infrastructures, électricité, services sociaux de base. Le 11 octobre, nombreux sont, par exemple, ceux qui ont voté dans la rue faute de locaux disponibles.
Malade de ses hommes politiques, le pays doit ouvrir une ère nouvelle. La commission électorale n’a pas été à la hauteur de la tâche qui lui était dévolue. Elle était impréparée, désorganisée, incompétente et dépassée par les événements. Mais l’apprentissage de la démocratie est rude. Cette deuxième élection pluraliste dans le pays doit transformer l’essai de la première, en 2010. La démocratie n’a pas de prix, mais elle a un coût.
Après la victoire d’Alpha Condé, des appels à manifester seront certainement lancés par l’opposition. Mais les Guinéens doivent considérer qu’ils avaient une chose à donner : leur suffrage, mais pas leur vie. Ils ont donné une leçon de démocratie au monde. C’était leur rôle. Le reste, c’est au droit de le dire.
A l’heure où, dans de vieilles démocraties, le défi est de lutter contre de forts taux d’abstention, le vote massif des Guinéens montre une véritable foi en la démocratie. Les électeurs ont fait preuve de maturité et de confiance à l’égard de la politique comme moyen d’expression d’idées plurielles. La jeunesse rêve d’espoir. Le lui permettre est le plus grand service que les hommes politiques peuvent rendre à leur pays.
Hamidou Anne est membre du think tank L’Afrique des Idées
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