Sur fond d’ethnocentrisme les Guinéens tirent le diable par la queue
- Par Administrateur ANG
- Le 20/12/2011 à 10:40
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Pris dans l’étau d’une pauvreté chronique, legs des régimes successifs dictatoriaux cyniquement prédateurs qui les ont martyrisés depuis l’indépendance en 1958 , et les soubresauts de tensions sociopolitiques engendrées par l’ethnicisme sans précédent de la dernière élection présidentielle, les Guinéens, las et éprouvés, connaissent des temps de plus en plus difficiles.
La présidentielle de novembre 2010, qui a permis le « passage » du pouvoir des mains des militaires aux civils, après plus d’un quart de siècle sans partage, n’a tenu aucune de ses promesses . Au contraire, le mal du Guinéen s'est aggravé. Comme si, à Conakry, on tombait de Charybde en Scylla :
Assurer le quotidien est devenu un véritable chemin de croix ; système D, ou on s’en remet aux subsides de la diaspora. Déjà frappés de
plein fouet par une conjoncture sociopolitique aigue, bon nombre de Guinéens, du fait de la hausse du prix du carburant par le gouvernement, ultime calvaire, se sont retrouvés sur la route à marcher à pieds.
La Guinée, sa jeunesse abandonnée à elle-même sans perspective d’avenir, ses citoyens laissés pour compte, une forte tentation d’occident, ses richesses prises en otage par les nouveaux maitres du pays, une clique de veilles badernes suprématistes, assoiffées de pouvoir et de richesses. Autopsie sommaire d’un pays au bord de l’agonie.
Sanfa est un des ces nombreux habitants de Conakry, qui croupit depuis des lustres sous le faix d’une misère du type moyenâgeuse : sans desserte régulière d’eau, d’électricité, et une alimentation suffisante, livré à l’insécurité grandissante.
Malgré son statut « privilégié » de fonctionnaire de l’Etat, Sanfa n’arrive pas à joindre les deux (2) bouts, avec son salaire mensuel d’environ 100 euros par mois (le smic guinéen) .Sa femme, encore qu’« une battante », secrétaire de bureau et vendeuse occasionnelle au yenguéma de madina, est obligée de mettre beaucoup du sien afin que la famille puisse arrondir les fins de mois.
A l’insuffisance du revenu, Sanfa allie le stress quotidien de pouvoir perdre son travail à tout moment .Pour cause : Le nouveau régime ethniciste d’AC et son excès de zèle, d’allégeance au chef et de délation ne tolère pas la différence .Le quadra a beau clamer être apolitique, « par déception des hommes politiques », me confie-t-elle au bout d’une ligne téléphonique assez vicieuse , il est loin d’être vu de cet œil-là par son entourage.
« Le changement », Sanfa l’avait tout de même espéré. Mais, en attendant Godot, depuis plus rien …
La cinquantaine bientôt amorcée, le vaillant homme se prend à rêver d’occident en eldorado, pour lui et pour sa famille, surtout pour ses enfants abonnés à l’enseignement au rabais de l’école guinéenne.
L’ascétisme du Guinéen est extrême. A l’instar de Sanfa, nombreux sont les Guinéens qui triment à tort depuis belle lurette dans le silence et l’indifférence coupable du pouvoir.
Autrefois fleuron de la sous-région sous la colonisation, décatie et insalubre, Conakry, l’ex- belle, est une ville méconnaissable aujourd’hui, qui ne peut tenir tête à ses consœurs d’Abidjan, Accra, Bamako, Dakar, à quelques encablures de là.
D’après les Nations-Unies, le taux de pauvreté s’est accru en Guinée ces quinze dernières années (15), passant de 40% de la population en 1995 à 58% en 2010.
L’état actuel de l’économie guinéenne préoccupe : une inflation supérieure à 20%, constante depuis feu Lansana Conté, 50 millions d’euros détournés chaque année selon le ministre du contrôle économique et financier, un endettement représentant 75% du PIB , une balance commerciale
perpétuellement déficitaire (-370,6 MUS$ en 2010) , et un taux de croissance annuel très erratique ,inferieur en moyenne à 2%, combiné à l’absence de vraies reformes en vue , et la cacophonie sociopolitique du pays , du genre à ne pas rassurer les investissements .
« Les commerçants n'arrivent plus à vendre leur riz. Les populations ont faim. Le préfet (…) et le maire de la ville (…) interdisent la vente à plus de 5.000 francs le kilo. Les fonctionnaires sont sommés d'adhérer au RPG (…) les moments sont durs. Y'a plus de jeunes dans nos villes .L'immigration est un désastre de ce point de vue.
Aujourd’hui le gouvernement à travers les préfets, les maires et autres fieffés du pouvoir RPG oblige les populations à subir un diktat des prix des denrées pour enrailler la montée des coûts dus notamment à l'augmentation des prix des hydrocarbures.
En même temps, ils distribuent des 4x4 à tous les responsables fédéraux du parti. Pour celui de (…) que je connais, il vient de recevoir une Mitsubishi sortie d'usine. Ils semblent qu’ils ont décidé d'acheter plusieurs marques différentes pour ne pas attirer l'attention. C'est exactement leur stratégie actuelle » témoigne un observateur avisé de la Guinée.
Le populo à la mode à Conakry résume parfaitement cette sombre fresque, « Manguè nènè kaamè nènè » : expression populaire soussou pour dire littéralement nouveau chef, nouvelle famine. Comme si en Guinée chaque nouveau pouvoir débarquait avec son lot de famine.
En dépit de son grand potentiel minier, minéralogique et humain, après plus de 53 années pleines d’indépendance, la Guinée, à cause de la malgouvernance de ses dirigeants, végète dans une pauvreté endémique. Ce qui a fait dire à juste titre quelqu’un que « la Guinée est un mendiant
assis sur de l’or ».
S.O.S. pour la Guinée en crise économique, politique, sociale et sociétale.
Oury Baldé
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