SEKOU TOURE QUAND LES DEPASSIONNES SE MELENT DU DEBAT
- Par Administrateur ANG
- Le 05/11/2007 à 11:30
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Fidèle à ma ligne de conduite, je choisis ce moment de répit dans ce débat pour apporter un point de vue sur ce sujet déchaînant de nombreuses passions : Sékou Touré. Ce texte est un cri d'alerte d’un citoyen en quête de savoir mais embrouillé par les versions circulant sur le net, le terrain et l’assemblée nationale à propos du premier chef d’Etat. En effet, les passionnés l’héroïsent aveuglement tandis que les détracteurs le diabolisent amèrement. Comment se retrouver entre ces polarisés ? Les jeunes de ma génération qui n’ont pas connu réellement la vie sous l’ère Sékou Touré, s’informent à travers des œuvres écrites et les témoignages des personnes plus mûres ayant vécu pendant cette première République. Mais force est de reconnaître que la mauvaise foi ambiante des conteurs, nous obscurcit au lieu de nous éclairer. Les versions pullulent et divergent. Ce débat, au lieu d’être instructif, tourne généralement à la désinformation. Encore une fois, l’ethnie s’immisce entre les parties. En gros : les rares personnes qui glorifient le dictateur sont généralement de la même ethnie que lui, et ceux qui ne le ménagent point, ne sont pas de son ethnie. Quelle place est donnée à l’objectivité ? A qui doit-on se fier ? Quand on se réfère aux manuels, l’accent est mis sur le fait que Sékou Touré est devenu paranoïaque après que son pays ait subi maints assauts avérés de déstabilisation commandités par la France du général De Gaulle. Cet état d’esprit faisait que le premier Président n’hésitait plus à emprisonner et à faire tuer les personnes qui étaient en désaccord, ne serait-ce qu’idéologique, avec lui. Ainsi, ses bonnes actions, s’il y en avait eu, sont forcément renvoyées dans les ténèbres et l’histoire et c’est normal. A l’image de la Guinée, d’autres pays d’Afrique ont été dirigés par des dictateurs. Pour autant, dans ces pays là, les débats ne sont pas si controversés que ça. Prenons le cas de Félix Houphouët Boigny de la Côte d’Ivoire. Rares sont les ivoiriens qui s’opposent à la célébration des différents évènements concernant ce dernier. Sa mort ne fut suivie d’aucune liesse populaire. Les ivoiriens, dans une grande majorité regrettent la période Houphouët. Le 7 décembre est la date retenue par les ivoiriens pour la commémoration de leur « héros ». Contrairement au peuple ivoirien, la grande majorité des guinéens ne partagent pas cette reconnaissance envers leur premier dirigeant. En témoignent les nombreuses festivités qui ont accueilli la venue du Comité militaire du redressement national (CMRN). Aussi, les nombreux guinéens qui ont déserté le pays durant l’époque Sékou Touré, ne l’ont pas fait par aventurisme. A un moment donné de son règne, l’homme tyrannisait son peuple et là-dessus on doit être tous d’accord. Cependant, un certain nombre de questions doivent chagriner les contradicteurs. Doit-on célébrer Sékou Touré parce qu’il a préféré pour son peuple « la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage ? » Le fait que la promotion 2007 de l’université de Conakry ait porté le nom Sékou Touré, sans que cela n’ait fait grand bruit, est-ce le signe que le peuple a approuvé ou est-ce simplement une manipulation de la jeunesse étudiante ? Pourquoi les Maliens célèbrent ce personnage ? Est-ce une insulte ou un hommage au peuple de Guinée ? Le temps panse les blessures, mais celles faites par Sékou à son peuple paraissent si immenses, que l’on peut se demander si le temps jouera un jour en sa faveur. Si certains meurent d’envie de le célébrer aujourd’hui en Guinée, on pourrait déduire que d’autres passionnés de cette actuelle deuxième République voudront célébrer le dictateur Conté demain. Alors que ce dernier n’a pas hésité à massacrer, récemment, des jeunes gens qui s’étaient levés contre sa dictature. Méditons là-dessus ! Quoi qu’il en soit, toutes les pages de notre histoire doivent nous être contées. Les émotions et les oeillères doivent être mises de côté afin que nous puissions extirper du débat, le vrai du faux, le faux du vrai. Ainsi les jeunes de Guinée pourront véritablement connaître leur histoire. Cependant l’ardente obligation doit être de rendre hommage à toutes les personnes innocentes qui ont été tuées. Les familles injustement endeuillées doivent recevoir le pardon de la République. L’Etat guinéen doit reconnaître ses erreurs, doit honorer la mémoire des innocents disparus, doit dédommager les familles endeuillées, doit faire des jugements, post mortem, s’il le faut. C’est un préalable indispensable à toute réconciliation sereine. Je reste convaincu que l’Etat, qui devra nous réconcilier avec nous mêmes, ne doit pas être celui piloté par Lansana & Lansana. Cette République des illuminés ne peut pas soigner les plaies qu’elle continue volontairement d’infecter pour préserver ses privilèges. Chaque chose a sa place, chaque chose a son temps. Le jour où nous allons nous défaire de ces boulets, notre marche vers un destin commun sera effective. Puisse des historiens, éclairer la lanterne des jeunes de Guinée.
Koumbassa Alassane
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