Professeur Aboubacar Diakité: «Je suis optimiste pour qu’on vienne à bout de l’épidémie»
- Par Administrateur ANG
- Le 05/11/2014 à 13:13
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Avec près de 1.000 morts pour un peu plus de 1.500 malades, la Guinée est le troisième pays le plus touché par Ebola. En tant qu'inspecteur général de la santé, Aboubacar Sidiki Diakité est l'un des premiers conseillers du président Alpha Condé en matière de lutte contre le virus. De passage à l'académie de médecine de Paris, ce professeur veut croire que son pays possède les armes pour en finir avec cette crise sanitaire.
Comment expliquer la flambée de l’épidémie, alors qu’avant l’été, elle était contenue?
Il y a eu une première flambée, qu’on a pensée maîtrisée. Mais en réalité, Des contacts et des cas suspects nous ont échappé car les gens ne voyaient plus d’intérêt à déclarer tous leurs contacts. Ils nous les ont cachés. Cela a créé de nouveaux foyers, étant donné la mobilité des populations. Après, il y a eu une reprise. On a rectifié notre message. On a aussi constaté qu’il y a une flambée chez nos voisins (Liberia et Sierra Leone). Or il s’agit des mêmes communautés.
Quelles erreurs ont été commises?
Quand il n’y a pas de médicament et de vaccin, qu’on sait qu’on va mourir, le réflexe est de se dire qu’on veut mourir près de sa famille. Ce repli des africains sur eux-mêmes a été un mauvais facteur. Nous avons aussi amélioré notre vision sur la maladie. Le challenge, c’est de suivre tous les cas suspects pendant 21 jours. On en a suivi 16.000. Tous les jours, il faut prendre leur température tout en renforçant le contrôle sanitaire au niveau des frontières.
Pourquoi le message est-il si mal passé au début de la flambée?
La Guinée est un pays composé de plusieurs communautés. Elles n’ont pas les mêmes perceptions. A chacune de ces communautés, il faut appliquer des stratégies particulières. On s’est rendu compte que les leaders locaux sont plus écoutés que les gens qui viennent d’ailleurs. La radio et la presse ne suffisent pas.
Comment jugez-vous l’aide internationale?
Depuis la déclaration de l’urgence sanitaire en août, la communauté internationale a annoncé beaucoup d’aides. Mais il se trouve que la mobilisation est en déphasage par rapport à la progression de la maladie. L’effort s’est aussi essoufflé avec le temps. Ce que nous retenons, c’est que des gens de MSF ont accepté de construire des centres. On se réjouit aussi de l’intervention française. Ça a été salutaire.
En quoi l’ouverture d’un centre de la Croix-Rouge à Macenta est-elle si importante ?
Macenta fait frontière avec le Liberia. C’était un foyer éteint. Mais dès qu’il y a eu une flambée au Liberia, Macenta a finalement connu beaucoup de pression. On a eu plus de difficultés à travailler là-bas que dans beaucoup d’autres districts. C’est le grand problème. Il n’y avait pas de centre de traitement sur place. Il fallait transférer les malades vers Gu Kedou. Or la route est en très mauvais état.
Quel est le risque désormais?
Une famille où il y a un cas d’Ebola est vite sans ressource. Après l’aspect sanitaire, il y a l’aspect économique. Dès l’instant où il y a un ralentissement économique, l’autre conséquence est politique. On attaque le pouvoir en lui reprochant de ne pas avoir fait ce qu’il faut pour lutter contre l’épidémie. Je ne dis pas que notre pays est menacé. Mais c’est un processus. Avec ce qui se passe, je suis optimiste pour qu’on vienne à bout de l’épidémie. Maintenant, les trois pays sont liés. Si on agit bien, le ralentissement de la maladie n’est pas unilatéral. C’est une courbe commune.
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