« Pouto », le bonnet guinéen aux origines aristocratiques
- Par Administrateur ANG
- Le 04/12/2017 à 12:13
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Patrimoine vestimentaire de la communauté peuhle, une des ethnies majoritaires de la Moyenne Guinée (ex Foutah théocratique ou Foutah Djallon), le bonnet « Pouto » ou « Poutoorou» est de nos jours porté par presque tous les Guinéens, avec le secret espoir de jouir de la respectabilité que conférait jadis ce couvre-chef.
Avant l’ère coloniale, le port du « Pouto » était au Foutah Djallon réservé exclusivement aux privilégiés tels les rois, les érudits, les notables et, à la limite, les nantis. Porté lors des grandes cérémonies religieuses, festives ou sociales, le « Pouto » procurait à son propriétaire respect, admiration et considération.
« Au temps de mon père, il était rare de voir un porteur de +Pouto+, en dehors des grandes cérémonies », témoigne Souleymande Bodié Bah. A en croire ce peuhl originaire de Dalaba, ville de la Moyenne Guinée, ses parents étaient venus s’installer à Dinguiraye depuis les années 1800.
Pendant les fêtes, notamment religieuses, l’imam, outre son « Pouto », arborait un boubou traditionnel agrémenté par des babouches aux pieds. Une canne ou un sabre complétait l’habillement de l’érudit. « Le choix de cet accoutrement n’est pas fortuit. Au contraire, il s’agissait, pour l’intéressé, d’affirmer son identité peuhle mais aussi de montrer son rang social », explique Souleymane.
Au fil du temps, le « Pouto » a été quelque peu désacralisé pour, entre autres vocations, devenir un cadeau offert aux hôtes de marque. « Dès que le présent (Ndlr, « Pouto ») est offert à l’hôte, la tradition voudrait qu’il le porte sur place, sous les acclamations de l’assistance. C’est la preuve qu’il a fait la Guinée », affirme Souleymande Bodié Bah, imam de la Mosquée de La Fontaine.
Outre ce symbole d’hospitalité, le « Pouto », surfant sur sa réputation première, permet aux Guinéens d’aujourd’hui d’acquérir une certaine respectabilité auprès de leurs vis-à-vis. En politique, les leaders originaires de la Moyenne Guinée ont pris l’habitude de le porter pendant leurs sorties publiques, leurs apparitions à la télévision ou leurs séances photos.
Ainsi, pendant l’élection présidentielle de 2010, trois des 24 candidats en lice, étaient identifiables sur leurs bulletins de vote grâce au « Pouto » : les opposants Cellou Dalein Diallo (originaire de Labé) et Mamadou Baadiko Bah (natif de Dalaba) ainsi que l’actuel ministre conseiller à la présidence de la République, Bah Ousmane (ressortissant de Pita).
Des politiques, le « Pouto » et devenu le couvre-chef de tous les Guinéens, donnant des idées aux futés artisans locaux qui ont ouvert des ateliers de fabrication du bonnet dans les huit villes de la région de la Moyenne Guinée, particulièrement à Mamou, la ville carrefour.
« Le Pouto est fabriqué partout en Moyenne Guinée. Mais la ville qui produit le plus grand lot, c’est Mamou comme à Timbo, Bhouriah », renseigne Elhadj Mamadou Diallo, coiffé d’un « Pouto » acheté 25 000 FCFA.
Il s’est offert un « Pouto » de classe, car on peut acquérir un couvre-chef quatre fois moins cher, soit 6000 FCFA. Le prix du bonnet varie suivant la qualité du tissu ou des éléments utilisés dans sa fabrication.
Le «Pouto» est également conçu sous différentes couleurs, tailles et formes, d’où, indique Aliou Diallo, artisan basé à Lélouma, il peut être rond ou carré.
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