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Ousmane Kaba : Les audits, la présidentielle et le peuple

La sortie médiatique la semaine dernière du leader du PLUS, Ousmane Kaba alimente le débat entre pro et anti. Mais au fait, pourquoi s'offusque-t-on à chaque fois que le mot audit est allégué, soit par un politique ou un ancien ministre de Conté ? Ou parce que ceux qui ont appartenu au régime défunt ne sont pas les mieux indiqués pour parler d'audit?

La Guinée est vraiment un pays de paradoxes où tous ou presque veulent de la chose et de son contraire. C'est dans cet esprit que tous les Guinéens progressistes plaident pour l'organisation correcte d'audits afin de déceler les crimes économiques et de poursuivre en Justice les présumés coupables. Il y en a cependant pour une raison ou pour une autre qui réagissent énergiquement au simple fait de prononcer le mot tabou : Audit. Ils voient en la démarche, un règlement de comptes.

Or la Guinée ne va plus continuer à faire fertiliser des criminels économiques ou supposés comme tels sur la misère implacable du contribuable plutôt happé par les soucis et la cruauté du quotidien. Autant donc d'épouser de nouvelles habitudes, censées contribuer au développement de la démocratie et de la bonne gouvernance. Pour y arriver, il est question de débarrasser de la Guinée de tous les cerveaux absorbés par des préoccupations quotidiennes d'enrichissement illicite ou de recherche des petits bonheurs privés.

La mangeoire d'abord, les dénonciations ensuite ?

Y a-t-il vraiment ce ministre de Lansana Conté qui n'ait pas été associé à la mangeoire ? Nous voulons le savoir. Tous ou presque ont accepté de manger à la table de leur patron sans jamais crier gare : la mangeoire d'abord, les dénonciations ensuite. Le vieux général n'est plus de ce monde. Tous ceux qui étaient à sa solde, le charge aujourd'hui. Ce patriarche de Wawa était-il réellement ce que ses anciens dévots et courtisans font croire actuellement ? De toute évidence, des rengaines du genre : « C'est le président qui m'avait demandé », « Cet argent était destiné au Chef », « C'était une demande express de l'autorité », etc. infestent le pays. Une bien belle manière... honteuse de se disculper.
Quoi de plus normal car l'accusé public ne peut plus répondre aux nombreuses charges portées contre lui. Ce comportement des anciens hauts cadres de l'Etat a-t-il un nom ? Aidez-nous alors à le trouver. Car, ces anciens hauts commis ont tous un dénominateur commun : moulés dans un système qu'ils ont voulu, ils ont servi un homme au détriment du peuple avec comme cynique objectif, avoir accès à la mangeoire. Après la disgrâce, en désirant nous gouverner, ce sont les mêmes qui dénoncent aujourd'hui les anciennes pratiques à partir desquelles eux-mêmes se sont fertilisés. D'une façon ou d'une autre, ils ont été comptables de la déchéance morale et matérielle du peuple. Conséquence, l'Etat a été cannibalisé, la Présidence phagocytée et le peuple affamé, englouti dans une misère sans fin.

En désespoir de cause, c'est le même peuple, dans une incapacité à tirer les leçons du passé pour mieux comprendre le présent afin de mieux s'organiser pour la victoire du bien sur le mal qui applaudi. Certainement pas avec la même ferveur. Mais (sans expression apparente), avec la même volonté du changement. C'est dans cette logique qu'un banquier et ancien ministre des Finances sous Sidya Touré, a été approché par Konaté pour étoffer l'équipe des auditeurs mise en place. Cet homme a pour nom Dr Ousmane Kaba, actuel leader du PLUS crée le 19 mars dernier et candidat à la présidentielle. 20 dossiers ont été identifiés.

Une farce, s'insurgent des leaders politiques qui pensent que beaucoup d'autres dossiers devraient être cités. Dans les 20 dossiers figurent néanmoins: Friguia (Usine de Fria), Futurelec (Mamadou Sylla), Air Guinée (Cellou Dalein ?), Rails Conakry-Niger, Banque centrale (Fodé Soumah et consort), Fonds Koweitien (Idrissa Thiam ancien proche de Conté qui serait en fuite aux USA, après s'être fait rembourser suite à une descente musclée à son domicile), SGP (carburant) , Investissements routiers, Fonds d'entretien routier Santullo (Guido Santullo, fuyant les fiscs italiens), Sociétés des Télécommunications, SMD (Société minière de Dinguiraye), SOGEAG (Aéroport Gbessia), SAG (société aurifère de Guinée), Guinomar, Société navale guinéenne, Enco5, Projet coton. Après le listing, il y a eu des applaudissements certes, mais certains voudraient voir là dans par exemple, EDG, SEEG, etc. De quoi douter de l'opportunité de la démarche et de l'efficience des auditeurs. Tant et si bien eux-mêmes, notamment Ousmane Kaba à y voir de clair, ne sont pas exemptes de toutes malversations.

Difficile de croire à Ousmane Kaba...
Aujourd'hui, vu sa sortie médiatique et la configuration politique actuelle, faut-il réellement croire en Ousmane Kaba qui évoque déjà 60 milliards qu'aurait détourné une seule personne, sans jamais la nommer? Pourtant, il avait déclaré : «Les audits ne seront pas une chasse aux sorcières, ni un règlement de comptes, moins une arme pour éliminer des concurrents politiques. Notre équipe sera neutre. Les procédures seront contradictoires, publiques et transparentes.» Selon lui, - à l'époque, membre influent de l'UFR, il n'était pas leader de parti politique - : « On procède aux audits pour éradiquer la mal gouvernance, en finir avec l'impunité et restaurer la crédibilité ou l'autorité de l'Etat. Mieux, on ne fait pas les audits des anciens Premiers ministres, ou des chefs de cabinet ou d'un professeur. Mais on audite des dossiers. Alors, si en le faisant, une personne est concernée, mais elle répondra».
Seul hic, selon des détracteurs qui ont toujours déploré le fait que ce sont seulement les sociétés commerciales qui ont fait l'objet d'audits, alors que la gestion publique devrait figurer en bonne place : « Il n'a jamais été un auditeur dans sa carrière. Cette carence devait le disqualifier totalement. Ousmane Kaba est après tout un ancien ministre et fonctionnaire de la Banque centrale. Il doit être en principe audité lui aussi... » Ousmane Kaba ancien économiste au FMI à Washington (1983-1986) était-il donc le mieux indiqué ?
Des langues fourchues y répondent tout en jetant un coup d'œil sur une prétendue existence « d'une villa à Nongo (environ 4,5 milliards au bord de la mer, son école privée koffi annan 8 milliards au début du lancement, depuis 3 ans, l'Etat lui verse 17 milliards de fg chaque année pour accueillir les étudiants à koffi Annan, sans compter les pourcentages qu'il demandait lorsqu'il était Ministre des finances) C'est lui qui va diligenter les audit transparents? Regardez bien les sociétés ciblées où est EDG? La SEEG? La caisse nationale de sécurité sociale,la Douane, les impôts, la Pharmacie centrale de Guinée, le Port autonome, le trésor, l'Intendance militaire, l'Assemblée nationale, le crédit revolving? Que le voleur arrête de crier au voleur. » Un des anciens dévots de Dadis Camara, le leader de l'UPR Bah Ousmane avait jubilé à juste titre, à l'annonce des audits afin de voir « les responsables de ces dégâts (NDLR : gabegie et dilapidations des fonds publics) qui à un moment donné ont assumé des responsabilités, qui sont supposés avoir des comptes à rendre de leur gestion puissent aujourd'hui venir dans l'arène politique, qui se recyclent en leaders politiques. » Suivez mon regard...

Arborant aujourd'hui sa tunique d'homme politique avec la création de son parti politique, PLUS, très proche du cercle présidentiel, celui qui fut ministre de l'Economie et des Finances, puis ministre du plan et de la coopération (1996-1998) sous le régime du général Lansana Conté et vice président de la commission des audits et de surveillance des secteurs stratégiques de l'économie nationale avec le capitaine Moussa Dadis Camara, dit n'avoir pas compris pourquoi les nouvelles autorités ont refusé que le résultat des audits soit publié avant la présidentielle. Tout en oubliant qu'il avait tenu un tout autre langage dont voici la teneur : «Les audits ne seront pas une chasse aux sorcières, ni un règlement de comptes, moins une arme pour éliminer des concurrents politiques. Notre équipe sera neutre. Les procédures seront contradictoires, publiques et transparentes.» Cette maldonne affecte manifestement le capital sympathie de cet ancien ministre. Mais L'homme lui s'en préoccupe peu.

Que répondez vous à ceux qui scandent « à bas les Prédateurs? », interrogent aujourd'hui des confrères de Africaguinee.com. Réponse de Ousmane Kaba : « C'est de l'hypocrisie. Toutes les parties qui composent aujourd'hui le gouvernement ont reçu les résultats des audits. Si le même gouvernement avec l'appui des partis politiques a décidé le black out sur les résultats alors, que ces partis fassent campagne en disant à bas l'impunité je trouve cela un peu hypocrite et je pense qu'on prend le peuple je ne sais quoi? Parce qu'on ne peut pas dire une chose et son contraire. Tous ces partis qui font campagne pour occuper le siège présidentiel, se sont mis d'accord pour ne pas publier les résultats des audits, alors comment on va combattre l'impunité? Dans tous les pays du monde, on combat l'impunité en publiant les résultats des audits et en sanctionnant dans un débat contradictoire avec le système judiciaire les délinquants financiers. » Amin !
Des milliards engloutis au nom de la souveraineté
Beaucoup de milliards ont été engloutis au nom de la souveraineté. Comme si cela ne suffisait pour donner des maux de tête, un rapport d'audits commandité par Lansana Kouyaté, alors Premier ministre avait démonté, selon JA du 19 au 25 mai 2008, les mécanismes d'un système qui a dilapidé une partie des ressources du pays, anéanti les réserves de change de la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG), favorisé une inflation à 40%, fait chuter les recettes du budget à 3000 milliards de francs guinéens (environ un demi milliard d'euros, soit la moitié du budget du Mali), et mis l'Etat dans l'impossibilité de fournir à la population des services élémentaires comme l'eau courante, l'électricité ou les transports publics.
Les acteurs de ce cataclysme économique se la coulent douce. Le rapport lui, cite entre autres : Aboubacar Bruno Bangoura, Ousmane Doré, Morissandan Condé, directeur de la Division des recettes, à l'époque des faits, le chef du bureau Conakry Port, Soriba Bangoura, à l'époque des faits. La liste est loin d'être exhaustive. Le ministère de l'Economie et des Finances n'était pas le seul à avoir été audité. La gestion de tous les autres départements indique le rapport d'audit version Kouyaté - aujourd'hui lui-même suspecté par des adversaires d'avoir fait quelque chose - a été passée au crible. Les résultats donnent le vertige. Un montant global de 262 milliards de francs guinéens a été détourné (229 milliards dans les ministères et services généraux, et 33 milliards dans les régions de l'intérieur du pays). Divers types de malversations ont été identifiés : détournement de ressources (56 milliards), paiement pour travaux non exécutés (20 milliards), dépenses non autorisées ou sans support (90 milliards) et dépenses non justifiées (20 milliards).
Au regard de toute cette pagaille administrative et financière, on se demande vraiment s'il n'était pas loisible de passer au scanner tous ces intellos qui veulent nous gouverner aujourd'hui. Dans l'imagerie populaire en tout cas, appartenir au système du régime défunt était automatiquement synonyme d'enrichissement illicite. Il y a eu des hauts commis qui ont volé mais n'ont laissé aucune trace, d'autres, y ont laissé des empruntes. C'est la seule différence ! Comment donc en finir avec les délinquants économiques et discipliner à jamais ceux qui auront bientôt la destinée de notre nation ? Et comment donner du culot aux autres politiciens appelés par leurs rivaux politiques d'aventuriers afin que leur voix porte dans la dénonciation des dérives constatées ?
A chacun d'y réfléchir et accepter l'autre afin que la démocratie ne rime plus à appartenance ethnique ou tribale. Ce, à l'heure même où critiquer tel ou tel veut dire chez certains chiffonner son ethnie et sa condescendance. 50 ans de gabegie ? Quand on perd, ne perdons tout de même pas les leçons tirées. C'est un combat de longue haleine qu'il n'est pas impossible de gagner. Pourvu qu'on ne nous utilise plus juste pour nous extorquer un suffrage ! Pour cela, on ne doit pas perdre de vue comme Albert Einstein que : « Il n'y a qu'un esprit fou qui croit pouvoir arriver à un résultat différent, tout en utilisant encore et toujours les mêmes méthodes». D'où l'impérieuse nécessité de changer de stratégies !

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