Lutte contre la polio en Guinée : La campagne de vaccination de l'espoir

Polio guinee h1Face à la résurgence de la poliomyélite en Guinée, avec 11 cas détectés depuis le 9 août 2023, les autorités du pays, soutenues par des partenaires techniques et financiers, ont lancé le jeudi 26 octobre une vaste campagne nationale de vaccination des enfants âgés de zéro à cinq ans au Centre Médical le Flamboyant de Ratoma. Cette campagne s'est déroulée sur trois jours, du 27 au 30 octobre, avec pour objectif de vacciner au moins 3 133 136 enfants dans les 38 districts sanitaires du pays.

"La vaccination est la solution contre le handicap"

Victime de la poliomyélite à l'âge de trois ans et demi, Sidibé Kerfala n'a pas connu une vie aisée. Tout a basculé en une nuit. "J'avais trois ans et demi. Une nuit, tout mon corps me faisait mal. J'avais vraiment mal partout, ma mère est allée chercher un médecin à côté. Quand il est venu, il m'a fait une piqûre et depuis lors je n'ai pas pu marcher, m'a expliqué ma mère".

Aujourd'hui âgé de 48 ans et condamné à vivre avec son handicap, il nous raconte qu'il a pris conscience de la poliomyélite quand il a commencé son traitement à l'hôpital.

"Je n'avais jamais été vacciné parce qu'à l'époque, c'était difficile. Nous vivions dans un village reculé à une vingtaine de kilomètres de Kankan (deuxième ville du pays et capitale de la Haute Guinée, ndlr). J'avais un oncle qui résidait à Kankan, on m'a envoyé là-bas. Il m'a accompagné à l'hôpital régional où on m'a donné beaucoup de piqûres. Ensuite, il m'a fait retourner au village pour prendre des médicaments traditionnels", nous raconte-t-il tout en caressant sa fillette assise sur ses jambes. "Quand j'ai eu six ans, ma mère m'a confectionné une poussette traditionnelle. C'est cette poussette qui m'a aidé à récupérer l'usage d'une jambe", dit-il.

Même s'il a depuis recouvré l'usage d'une jambe, la seconde est toujours paralysée, l'obligeant à marcher à l'aide d'une canne.

Quand il était enfant, Sidibé Kerfala avait commencé son éducation à l'école française, mais en raison de la distance et de sa maladie, il a été contraint d'abandonner ses études au niveau du collège. Cependant, il n'a pas abandonné l'espoir d’une bonne éducation. Il a pris la décision de venir

à Conakry, la capitale, où il a pu bénéficier d'une formation professionnelle avec le soutien de l'Association guinéenne pour la formation et la réinsertion sociale des personnes handicapées en 1992.

"Il est essentiel de souligner que l'émergence de maladies autrefois sous contrôle, telles que la coqueluche et la diphtérie, nous rappelle la nécessité de renforcer nos stratégies de vaccination et d'engager un dialogue efficace avec les communautés en faveur de la vaccination."

"J'ai rencontré de nombreuses difficultés, le déplacement me coûtait cher. Après ma formation, trouver un emploi a été une grande source de préoccupations. Les choses ont commencé à changer quand je suis venu à la Cité Solidarité. Là, j'ai rencontré une dame volontaire américaine. Avec elle, nous avons créé une ONG appelée WONTANARA, un mot d'origine sousou qui signifie 'on est ensemble'. J'ai continué à former les gens, et en parallèle, j'ai participé à un concours que j'ai remporté, ce qui m'a permis de créer mon propre atelier de couture", poursuit-il.

Aujourd'hui, alors que la poliomyélite refait surface en Guinée, il encourage les parents à profiter des campagnes de vaccination pour protéger leurs enfants.

"Je lance un appel aux parents pour qu'ils accompagnent leurs enfants à la vaccination. La vaccination est la solution contre le handicap. Lorsque vous avez aujourd'hui un enfant handicapé, cela entraîne de nombreuses charges. Obtenir un fauteuil roulant, un tricycle ou une canne est très difficile. Je demande aux parents de faire vacciner leurs enfants pour les préserver des difficultés que nous avons rencontrées tout au long de notre vie !".

"En Guinée, vivre avec un handicap est difficile", renchérit Sylla Mariam, victime de la poliomyélite depuis 1968 alors qu'elle avait trois ans. "On subit toutes sortes de discriminations, même dans les véhicules, vous n'êtes pas bienvenus. Les taxis vous prennent difficilement, et il y en a d'autres qui vous ignorent complètement. Nous sommes victimes de la discrimination. En tant que femmes handicapées, les hommes ne veulent pas nous épouser. Ils nous considèrent comme des fardeaux. Nous représentons une charge, même si certaines d'entre nous exercent des activités et gagnent un revenu. D'autres ont choisi de poursuivre leurs études, obtenu des diplômes et travaillent, mais malgré tout cela, elles n'ont pas la chance d'être mariées", déplore-t-elle, soulignant qu'elle-même a eu la chance d'être mariée et est maintenant mère de trois enfants qu'elle élève seule, son mari étant décédé.

Relance des activités de vaccination

Grâce à l'appui de Gavi, l'Alliance du vaccin, et de ses partenaires, la Guinée a relancé les activités de la vaccination intensifiée (AVI) depuis le 21 juin dernier. Après cette campagne, une nouvelle campagne de vaccination contre la polio est prévue dans un mois.

Par Alpha Abdoulaye Diallo

Source: .gavi.org

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