Le Drame de Womè

Index 46

Je tiens encore une fois à condamner toutes les violences commises en Guinée, peu importe l'ethnie, la religion ou l'appartenance politique des auteurs. Je n'ai pas assez d'éléments pour parler des faits alors je préfère dans ce cas ne pas m'y prononcer; ce que je peux dire par contre, c’est que je connais deux des victimes.

La première est Molou, le nom que je connais de lui est Nyankoye Molou François et sur la liste des victimes, j'ai lu Molou Chérif, je pensais alors à un autre Molou, apparemment, sauf erreur d’information, il s’agit du même technicien de la radio rurale.
 
Je l'ai côtoyé quand j'étais installé à N'Zérékoré avec mon centre de formation, nous avons eu de bons rapports.
La seconde est Dr Barry, je l'ai connu quand j'étais en France, il est un grand ami à un oncle qui me l'a présenté lors de mes vacances, par la suite je le croisais de temps à autre et nos échanges étaient sympathiques.
 
Un jour à l'hôpital de N'Zérékoré, Dr Barry parla le toma à quelqu'un avant de s'éloigner, une dame fut si étonnée qu’un  Monsieur à coté éclata de rire et dit « Madame, Dr Barry parle très bien le kissien aussi », quand Dr Barry retourna, l'anecdote l'amusa et c'est là qu'il nous expliqua que quand il commença son service dans le pays kissi, son premier acte fut d'apprendre le kissien et sa femme est toma, voilà pourquoi il parle bien ces deux langues.
 
Tout récemment, quand des médecins américains demandèrent un inventaire des besoins de l'hôpital de N'Zérékoré, c'est Dr Barry qui fut l'interlocuteur de la fondation Félix Daubige, son enthousiasme, ses remerciements et ses bénédictions nous marquèrent.
 
Je tiens à présenter mes condoléances aux familles des victimes.
 
Un petit rappel de l'histoire des atrocités dans notre pays avant de continuer mon texte:
 
Avant l'indépendance, des sousous jetèrent des peulhs dans des puits à Conakry, etc.
Le politicien Nyakoye Samoé fut assassiné entre Macenta et N'Zérékoré dans des conditions atroces.
 
Des pendaisons dans toutes les villes, des privations de nourriture jusqu'à la mort, des personnes enterrées vivantes etc. sous le règne de Sékou Touré.
Des manifestants fusillés, des malinkés lynchés, etc. sous le règne de Lansana Conté.
Des femmes violées, des tirs sur des manifestants désarmés dans un stade ouvert sous règne de Dadis Camara.
 
Des Peuls tués et d'autres lynchés à Kankan et Siguiri, sous la transition de Sékouba Konaté.
Des tirs sur des civils dans leurs sommeils à Zowota, des donzos qui tirent sur des manifestants, de l'essence sur des guerzés pour en faire des torches vivantes à N'Zérékoré, sous Alpha Condé.
 
La liste est longue, de tout temps, il y a eu des violences inouïes dans toutes les régions de notre pays, pourquoi alors plus d'indignation pour certain dans ce cas précis ?
 
Moi je trouve que toutes ces violences sont sauvages et inhumaines et je les condamne de la même manière. Aucune famille, aucun village, aucune ville, aucune ethnie ou encore moins, aucune région n’a le monopole de la violence.
Il est vrai que notre pays n’a pas de bibliothèque mais des entretiens avec nos ainés nous permettent de connaître des pans de notre histoire.
 
Le ministre de la communication dit qu’il n’y aura plus d'école et de centre de santé parce que le sous préfet est assassiné, pendant qu'il y est, pourquoi ne pas raser tout simplement Womè de la carte de la Guinée?
 
Quand je lis des déclarations du genre « tous les habitants de Womè ont attaqué huit personnes », je me demande où va notre pays? L'on veut nous faire croire que les vieux, les vieilles, les handicapés, les aveugles, les enfants (y compris les nourrissons) et même le débile du village, ont participé au massacre.
Il y a quelques années, j’avais publié un article «Les généralisations, les amalgames etc. qui nous tuent", il est toujours d'actualité, malheureusement.
 
Connaissant la férocité de nos hommes en uniforme, la nouvelle d’un renfort militaire poussa les habitants à vider le village, des innocents sont morts et d'autres innocents vont payer. Imaginez le drame lié à cette fuite collective et aux exactions qui suivront.
 
Avec l’impunité et le manque de confiance des populations aux autorités, avec les haines qui naissent et se développent, pas besoin d'être un voyant pour dire que d'autres violences en gestation éclateront, vont-ils mettre des bases militaires dans toutes les zones d’atrocité?
 
Je connais des journalistes compétents en Guinée, mais en lieu et place, l’on nous met un troubadour au poste de ministre de la communication ; que voulez-vous, il ne peut que brasser du vent pour faire plaisir à son chef.
 
Le comble dans tout cela, est la déclaration d’un responsable administratif qui affirme que la barbarie et la sauvagerie sont dans les gènes des forestiers.
Je ne sais pas s’il faut en rire ou en pleurer ; à quand la fin de la descente aux enfers de notre beau pays?
 
J'avais dit aussi dans un autre article que les extrémistes de tout bord mettront le feu dans en Guinée, nous n’en sommes pas loin, en tout cas tous les ingrédients sont réunis.
Je crois qu’il est temps que les démocrates guinéens de tout bord prennent leurs responsabilités.
 
Nb : J’ai reçu beaucoup de messages concernant ce drame et ma réponse est la même, les nouvelles de la Guinée m’attristent et me dépriment à tel point que j’ai pris du recul.
 J’ai eu de la peine à écrire cet article, voilà pourquoi je n’interviens plus dans des débats politiques et je compte mettre entre parenthèse mes articles sur la politique guinéenne.
 
Je suis membre du Bloc Libéral, j’ai l’intention de me contenter que des déclarations de notre parti.
 
Pour finir, j’aimerais donner un conseil aux extrémistes qui font en ce moment des déclarations incendiaires, faites attention, ce pouvoir n’est pas éternel, quand le vent tournera, vous risquerez de vous mordre le doigt.
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