Le boulanger de Guinée
- Par Administrateur ANG
- Le 17/04/2015 à 21:55
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Rappel des faits
Sur différents sites, le gouvernement - par l’intermédiaire d’Albert Damantang Camara, Rachid N’Diaye et Amadou Damaro Camara notamment -, a tenté de justifier ses manœuvres tendant à reporter les élections communales en 2016.
Entre autres arguments, sont évoqués notamment :
- le respect de la Constitution ;
- la non hiérarchie entre les élections, en témoigne le fait que l’accord du 3 Juillet n’en prévoit pas (selon Damantang) ;
- l’indépendance de la CENI : lors de la conférence de presse du 17 Mars 2015, Alpha Condé a indiqué que la « date des élections [présidentielles], c’est la Constitution qui le dit, ce n’est pas moi. On ne peut pas vouloir d’une démocratie sans pour autant respecter les principes démocratiques. La CENI est un organe indépendant. C’est elle qui décide et moi j’entérine à travers un décret », ce que confirme Rachid N’Diaye en rappelant à juste titre que la CENI propose une date, que normalement le PRG accepte.
- le fait que les délégations spéciales ne jouent aucun rôle en matière électorale.
Face à ces 4 arguments, il est bon de rappeler certains faits à Alpha Condé.
Sur le respect de la Constitution
En premier lieu, Alpha Condé a périodiquement violé la constitution (j’ai écrit suffisamment sur ce point sans qu’il soit la peine d’y revenir). Il voudrait pourtant que l’opposition respecte un texte, que lui viole constamment. Doit-on encore lui rappeler, que les délais impératifs qu’il invoque pour l’opposition concernant les présidentielles, sont les mêmes qui s’imposaient à lui en Juillet 2010. Mais comme chacun se souvient, il ne les a pas respectés, puisqu’on les a allongés de plus de 4 mois, afin de lui permettre de légaliser son futur hold-up électoral.
En France, donc par la force des choses, en Guinée, il faut une loi organique pour changer l’ordre des élections. Pour être effective, cette loi devrait être validée par la Cour constitutionnelle, obligatoirement saisie sur ce genre de texte, puisqu’il s’agit d’une loi organique précisant les modalités d’application de la Constitution. Toutefois, ici il ne s’agit pas d’une inversion de scrutins, mais d’absence d’élections communales, qui sont normalement programmées tous les 5 ans. On n’aurait donc pas du pouvoir y déroger.
Étant donné qu’aucun élu n’a le droit de rester à son poste après la fin de son mandat – n’est-ce pas la raison qui avait été avancée par le pouvoir pour justifier le remplacement de certains élus par des délégations spéciales ? -, tout acte action émanant d’un élu communal, dont le mandat est forcément expiré, est illégal.
Sur l’absence de hiérarchie entre les élections
De même, s’il n’y a pas de hiérarchie entre les scrutins, pourquoi avoir choisi la présidentielle d’abord et pourquoi le justifier en évoquant l’accord du 3 Juillet 2013, auquel la mouvance n’accorde aucun crédit ? L’accord du 3 Juillet ne concerne pas les élections communales selon la mouvance, mais c’est pourtant en vertu de cet accord que l’opposition devrait s’incliner !!!
Les dernières élections communales en Guinée ont eu lieu le 18 Décembre 2005. Le Code électoral en son article 113 précise que « les conseils communaux sont élus au scrutin proportionnel de listes à un tour, pour un mandat de 5 ans, renouvelable ». Par conséquent, le mandat des conseils communaux a expiré le 17 Décembre 2010, soit plus d’un mois après le 2ème tour des élections présidentielles organisées le 7 Novembre. Il appartenait donc au régime d’Alpha Condé d’organiser les élections locales, qui devaient avoir lieu depuis son arrivée au pouvoir.
De même, la nouvelle CENI a été mise en place en 2012. En 3 ans, les commissaires ont été payés grassement pour l’organisation d’une seule élection (les législatives de 2013) et éventuellement les présidentielles de 2015, mais rien en 2014. 25 sinécures qui créent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent.
Sur l’indépendance de la CENI
Alpha Condé ayant annoncé en France (avant même la proclamation de la CENI « indépendante ») de la date des élections présidentielles, on se demande ce que veut dire indépendante selon son entendement ? Indépendante de l’opposition, sans doute ? De qui se moque t-on ?
Par ailleurs l’acceptation de la proposition de la CENI n’étant pas automatique – on se rappelle qu’Alpha Condé avait rejeté la date en Juin 2013 par exemple -, les affirmations gouvernementales sont donc erronées.
Sur l’absence de rôle électoral pour les délégations spéciales
Selon le Conseiller spécial du PRG, les municipalités ne jouent aucun rôle dans les élections locales. Je lui conseille donc de se souvenir qu’ils sont toutefois responsables de la rétention sélective des cartes électorales, de sorte que certains électeurs favorables à l’opposition n’ont pas pu voter (à Fria et Gaoual notamment).
Est-il nécessaire de rappeler également certains extraits du Rapport de la Mission d’Observation Électorale de l’Union Européenne (MOEUE) en 2013 ?
En effet, selon cette dernière et contrairement aux dispositions du Code électoral (article 34), confiant leur distribution à des commissions d’affichage, de correction et de distribution des cartes électorales, le rôle des chefs de quartier et de l’administration, est resté prépondérant1. Ainsi la MOEUE a observé les étapes de délivrance des cartes d’électeurs dans 34 des 38 circonscriptions du pays. L’étude extraite de ce travail de terrain fait ressortir entre autres une distribution réalisée par des acteurs non habilités, dont les chefs de quartier2.
Enfin le parti présidentiel a reçu un appui considérable de l’appareil de l’État au travers de moyens matériels, financiers et logistiques. La MOEUE a en effet noté l’implication sur le terrain, de 8 ministres, 4 gouverneurs, de préfets et sous-préfets, de maires, de chefs de quartier et de fonctionnaires. La législation en vigueur encadre pourtant l’utilisation des biens de l’État et l’impartialité des fonctionnaires d’État et territoriaux (articles 52, 53 et 219 du Code électoral3).
De toute façon, si la mouvance dit que les délégations spéciales n’ont aucun pouvoir pour influencer les élections, elle n’a qu’à montrer sa bonne foi en faisant cesser cette illégalité, et en réinstallant les anciens responsables de l’opposition, à défaut d’élections communales. Ce serait une preuve supplémentaire, que puisqu’ils ne jouent aucun rôle dans les élections, on peut sans problème remettre en selle les anciens élus de l’opposition. Chiche ?
Comment en est-on arrivé là, autrement dit à qui la faute ?
À Alpha Condé ?
Le passé récent montre qu’il n’est pas utile de dialoguer avec ce gouvernement sans conditions, puisque ce dernier ne se sent pas engagé par ce qu’il a signé, a fortiori ce qu’il a dit, ce qu’ont confirmé les deux facilitateurs du dialogue politique inter-guinéen de 2013. Il ne faut donc discuter qu’avec le Chef de l’État, d’abord parce qu’il est le premier responsable de cette crise, puisque selon l’article 45 alinéa 2 de la Constitution « il assure le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et la continuité de l’État » et ensuite parce que toutes les décisions passent par lui. Or Alpha Condé non seulement n’a rien fait ces quatre dernières années pour organiser les élections locales, mais il a au contraire remplacé les élus qui ne lui sont pas favorables, par des affidés.
À Mohamed Saïd Fofana ?
Peut-on incriminer le Premier Ministre, Mohamed Saïd Fofana, qui selon l’article 58 alinéa 3 de la Constitution, « est responsable de la promotion du dialogue social et veille à l’application des accords avec les partenaires sociaux et les partis politiques » ?
Toutefois au vu de son inconsistance et de son insignifiance – il ne sert à rien, sauf à symboliser un « partage » (purement théorique d’ailleurs) du pouvoir, avec une partie de la Basse Guinée -, il ne vaut même pas de s’y attarder.
Quid de l’opposition ?
Certains commentateurs considèrent que l’opposition a tort de penser, que le pouvoir veut maintenir les maires, les chefs de quartier et autres délégations spéciales, qui sont à sa solde, afin d’influencer, voire de tricher lors des opérations de vote et de décompte des voix. Elle aurait donc tort de s’arc bouter sur l’ordre des élections, au motif que lors des élections législatives de Septembre 2013, ces mêmes délégations spéciales n’ont pas pu empêcher la victoire de l’opposition dans les 5 communes de Conakry notamment. C’est particulièrement malhonnête de dénier cette exigence à l’opposition, alors qu’elle s’est battue pour empêcher la fraude du pouvoir (pendant 20 jours à Matoto par exemple). C’est particulièrement indécent d’oublier certains faits, qu’il est toujours possible de vérifier (voir le Rapport de la MOEUE sur les scrutins à Kaloum, Matoto et N’Zérékoré notamment4).
Quid de la CENI ?
La CENI n’est pas indépendante, ses membres ignorant même ce que cela signifie concrètement. Ils sont donc de fait incompétents, en témoigne le Rapport précité de la MOEUE. Oser dire le contraire, reviendrait à les considérer comme malhonnêtes.
Pourquoi en est-on arrivé là, autrement dit pourquoi Alpha Condé a inversé l’ordre des élections ?
Les raisons sont assez simples à comprendre, du point de vue d’Alpha Condé, parce que :
- il a mis en place un système frauduleux, le seul lui permettant de donner une apparence légale au nouveau hold-up qu’il s’apprête à faire. Dans aucun pays du monde – sauf la Guinée – on perd une élection lorsqu’on possède 44% des voix au premier tour, avec le soutien d’un challenger, qui avait obtenu 13%. Seuls des Guinéens peuvent vous faire croire que le soleil tourne autour de la terre.
- cela mobilise tous les Guinéens, toutes ethnies confondues, avec ou contre le pouvoir. Chacun sera en mesure de constater que l’opposition, contrairement aux déclarations d’Alpha Condé est non seulement diverse et prête à batailler contre ce pouvoir, mais également majoritaire (le gonflement « surnaturel » des électeurs dans la région de Kankan – un million d’électeurs, soit 25 % du corps électoral quand même !!! - n’affectera pas les autres régions). Les luttes laisseront forcément des traces, qui se répercuteront sur la motivation de nombreux candidats de l’opposition, qui se battront pour évacuer leur frustration de ne pas avoir été éventuellement élus.
- la dynamique victorieuse de l’opposition, quand bien même elle n’aurait pas la majorité formelle à cause d’un fichier électoral non révisé, jouera pour les présidentielles. Actuellement elle ne contrôle aucune des 38 préfectures, et même un score de 45% minimum (à l’image des législatives) lui octroyant une quinzaine de mairies, suffirait pour éviter les fraudes sur tout le territoire.
Que compte faire l’opposition ?
Boycotter la CENI
C’est une mauvaise solution, car les absents ont toujours tort (se rappeler l’insertion d’un million d’électeurs supplémentaires dans la région de Kankan dans le fichier électoral en l’absence d’opposition). Les commissaires sont officiellement indépendants et l’article 8 alinéa 3 de la loi organique sur la CENI de Septembre 2012, stipule que « dans l’exercice de leur fonction, les Commissaires de la CENI ne doivent ni solliciter ni recevoir d’instructions ou d’ordre d’aucune autorité publique ou privée, y compris leur structure d’origine. Ils n’obéissent qu’à l’autorité de la loi ». On sait ce qu’il en est, personne n’applique ce principe, et même les commissaires choisis par l’opposition excipent de cette qualité, seulement pour rester en place, mais pas pour faire un travail rigoureux et efficace.
De toute façon, l’opposition ne peut pas se prévaloir de ses propres turpitudes. Elle a accepté cette nouvelle CENI, malgré les avertissements : qu’elle assume. Aujourd’hui elle doit bien sûr respecter la loi, mais elle doit aussi la faire respecter par le pouvoir. Vouloir agir par consensus, et donc contrevenir au respect de la loi, permet aussi au pouvoir de se retrancher derrière un éventuel consensus... pour contourner d’autres lois.
Les commissaires peuvent toujours faire des déclarations, cela ne change rien. Ils doivent au contraire vérifier le contenu du fichier électoral. En ont-ils la compétence et la volonté ?
Boycotter l’Assemblée Nationale
En revanche, l’absence des députés à l’Assemblée Nationale n’y empêchera pas le vote des lois ordinaires, mais dans la réalité, leur présence ne change rien. Par contre, les lois organiques, faute de quorum (2/3 des députés) ne pourront être votées. Actuellement, il reste la Haute Cour de Justice, le Haut Conseil des Collectivités territoriales et la Cour des Comptes, des Institutions dont l’absence ne dérange pas Alpha Condé, bien au contraire.
La polémique sur les marches pacifiques
Certains internautes (notamment de la mouvance) ne comprennent pas pourquoi l’opposition est prête à utiliser ce qu’ils considèrent comme de la violence, pour parvenir à leurs fins. Je rappelle que c’est le gouvernement qui l’utilise, par la violation de la Constitution, qui est le texte suprême sur lequel repose les institutions, et que tout le monde a accepté. Vouloir changer les règles du jeu unilatéralement est inacceptable. Évidemment il y a toujours des zozos pour considérer que lancer des cailloux dans la rue est plus dangereux que détourner cent cinquante millions de dollars, et qu’il y a lieu de tirer à balles réelles sur les premiers et de féliciter les seconds.
Marcher pacifiquement (sans armes, quelles qu’elles soient), et calmement (comme si l’on se rendait à un enterrement) dans la rue est tout sauf violent. C’est le gouvernement qui instrumentalise toute initiative de l’opposition, comme étant violente. Il ne s’agit pas de faire « la pagaille » pour reprendre une expression inadaptée et volontairement orientée. En quoi aller chercher quelqu’un à l’aéroport est-il générateur de pagaille ? À titre d’information, la Constitution stipule dans son article 10 que : « tous les citoyens ont le droit de manifestation et de cortège ».
L’opposition a donc eu raison de ne plus reconnaître les délégations spéciales et de ne pas solliciter une autorisation de marche (dans la mesure où les autorités ne représentent qu’elles-mêmes). En outre, la mouvance a tort de rappeler qu’à défaut d’autorités locales, il est nécessaire de solliciter le gouverneur ou le Ministre de la Décentralisation, car le Code des Collectivités locales ne le prévoit pas.
Par contre il est vrai qu’il faut respecter ce qui est dit. Lorsqu’on prévoit une marche le lundi et le jeudi, il ne faut pas improviser une marche le mardi, parce que celle du lundi a bien fonctionné. Les gens s’organisent et se préparent, l’improvisation paie d’autant plus rarement qu’on n’en a oublié les buts de la marche initiale, présentée au départ comme une lutte contre l’insécurité. Il faut déterminer un programme et s’y tenir envers et contre tout, sous peine de perdre sa crédibilité.
Que faire pour être efficace ?
Il faut être clair sur ses objectifs pour définir une stratégie : que veut l’opposition ?
- des élections libres, crédibles et transparentes ?
- le changement d’ordre des élections présidentielles et communales ?
- le départ d’Alpha Condé ?
Une fois les idées claires, il faut procéder par ordre et ne pas courir plusieurs lièvres à la fois, surtout si les objectifs sont contradictoires, parce que non simultanés.
Faire constater les nombreuses violations constitutionnelles et légales
Personne ne peut prétendre posséder une solution qui satisfasse tout le monde, puisque les intérêts sont opposés. Par rapport aux 3 questions précitées, il faut modifier l’ordre des élections, pour retrouver l’esprit de la Constitution et un État de droit. Si cela doit reculer les élections présidentielles de 4 mois, pourquoi pas, on a déjà connu cela en 2010 et Alpha Condé ne s’en est pas plaint. La Communauté internationale cependant, devra veiller au respect du consensus en l’absence de légalité constitutionnelle.
S’il faut faire partir Alpha Condé – et c’est aussi mon souhait – il faut le faire proprement, par des élections libres, crédibles et transparentes, et non par la violence. La Guinée doit cesser ce genre de modèle et œuvrer réellement par la mise en place d’une démocratie, car un État de droit est ce qu’il y a de plus précieux pour l’avenir du pays, y compris au niveau économique.
Concrètement, Alpha Condé ira jusqu’au bout de sa manœuvre, car il ne peut faire autrement s’il veut gagner les élections. Toute décision inverse aboutirait à sa chute. Au pire il peut proposer de coupler les deux élections, ce qui ne résout pas le problème de l’opposition. À partir de là, les marches ne feront que grossir le camp des victimes, même si la responsabilité ultérieure en incombera aux criminels, qui seront irrémédiablement poursuivis malgré leur sentiment d’impunité. Mais à quoi servira aux victimes d’avoir raison plus tard, s’ils ne sont plus là pour le constater ?
Dès lors la bonne attitude consiste à intenter une multitude de recours pour faire prévaloir le droit, même sans garantie de succès, mais avec l’idée que ceux qui ignorent la situation guinéenne en seront informés. Il y en a beaucoup plus que l’on s’imagine, car malgré la propagande, la Guinée n’existe pas sur le plan international en dehors d’ébola (même les invitations récentes d’Alpha Condé à l’extérieur du pays le sont au titre d’ébola). Évidemment il ne faut plus utiliser la justice guinéenne qui s’est compromise.
Cet État de droit passe par le respect du droit, mais l’opposition n’a jamais – du moins officiellement - utilisé cette voie. On va l’y obliger indirectement. On saura alors si le pouvoir qui n’a même pas honte de parler de démocratie en Guinée s’y plie ou non. Dans l’hypothèse favorable, une grande avancée aura eu lieu pour l’avenir, ce qui permettra aussi de décourager toute tentative éventuelle ultérieure de prise du pouvoir par la force. Dans l’hypothèse négative, les masques tomberont pour les naïfs et personne – y compris la Communauté internationale - ne pourra blâmer une violence, qui aura alors malheureusement sa raison d’être.
S’organiser comme de vrais partis politiques
Les différents partis de l’opposition sont suffisamment divers pour couvrir tout le territoire guinéen. Il faut apprendre à partager le pouvoir en 4. Cela permettra de s’organiser à tous les stades de la procédure pour faire respecter le Code électoral régulièrement bafoué en amont (affichage des listes électorales, récupération des cartes électorales dans les délais, révision du fichier…), mais surtout en aval (vérification du nombre de votants, transmission des PV, respect de la présence des observateurs…).C’est à ce moment là seulement, lorsque la population sera informée des manœuvres du pouvoir, et que des élections constateront la fraude, que des marches pacifiques prendront tout leur sens, y compris pour chasser Alpha Condé du pouvoir, ce dernier ayant montré qu’il ne veut pas se soumettre à la volonté populaire. Ce n’est pas lui qui décide ce qu’est la volonté populaire, ce sont les Guinéens qui l’expriment.
Un programme succinct mais clair
L’opposition doit saisir la chance et l’intelligence qu’elle a eu, de mettre au second plan l’intérêt particulier de ses leaders. L’opposition a montré à Paris qu’elle pouvait taire ses différences. Mais elle doit aller plus loin en expliquant qu’elle a définitivement enterré ses divergences et qu’elle est prête à gouverner ensemble. En 2010, l’UFDG n’avait d’yeux que pour l’UFR et n’avait rien à proposer au PEDN ou aux partis représentant la forêt.
Elle pourra faire un bilan rapide – sans euphémisme, ni pléonasme – de ce régime et proposer un programme clair de ce qu’elle fera, sans faire de promesses démagogiques.
Au titre du bilan, la jeunesse guinéenne peut constater que des décisions se prennent en son nom, par des dirigeants, davantage préoccupés par leur sort personnel, que par celui de la population. Chacun est capable de comprendre cela, en dépit des diversions du RPG pour décourager les volontaires. Qui ose dire aujourd’hui que la jeunesse guinéenne (plus de 60% de la population) a résolu ses problèmes d’emploi, de logement et donc de « mariage » qui sont les 3 préoccupations essentielles d’un jeune aujourd’hui ? Qui peut dire qu’avec les différentes mesures prises par ce gouvernement, ces 3 objectifs ont été pris en compte ?
Des hôtels, des logements hors de prix, des casernes, des commissariats et des préfectures, des routes, c’est bien, mais non seulement cela ne résout pas le quotidien de la majorité de la population, mais cela ne suscite aucun espoir ultérieur pour cette jeunesse. Serrer la ceinture n’est pas un objectif, surtout si cela ne débouche sur rien. On promet encore des milliers d’emplois (c’est gratuit) – mais seulement si des étrangers viennent.
Les marches pacifiques comme ultime recours
Les marches populaires doivent donc être utilisées avec parcimonie, car si cette méthode n’aboutit à rien – et elle ne peut aboutir pour l’instant à mon sens -, et ne reconfigure pas le logiciel mis en place par le pouvoir pour frauder, la justice bafouée ne pourra laisser place qu’à la seule violence. L’opposition ne peut plus se laisser faire, mais elle doit lutter pacifiquement pour se faire entendre, et c’est seulement si elle n’obtient rien, ou si elle fait face à un régime qui refusera les condamnations évidentes qui ne manqueront pas de pleuvoir, qu’elle ne devra plus reconnaître qui que ce soit, y compris le PRG5, car une partie de l’opposition aura enfin compris qu’avec des gens sans foi ni loi, il faut se comporter de la même façon, sous peine de se faire rouler une nouvelle fois dans la farine, par le boulanger de Guinée. Mais cette fois, et cette fois seulement, personne n’y trouvera à redire.
Pour l’instant on n’a pas tout essayé, mais même si certains pensent que c’est inutile de procéder par la voie judiciaire. De nombreux citoyens silencieux préfèrent néanmoins privilégier l’intérêt général du pays aux désirs immédiats des politiciens. En outre la Communauté internationale ne pourra plus dire que tout n’a pas été fait…
Gandhi, citoyen guinéen
« Dans tout État libre, chaque citoyen est une sentinelle de la liberté qui doit crier, au moindre bruit, à la moindre apparence du danger qui la menace ». (Robespierre, Discours sur la liberté de la presse, Mai 1791).
1Rapport de la MOEUE p 24.
2Rapport de la MOEUE p 24.
3Rapport de la MOEUE p 26.
4Rapport de la MOEUE p 39 à 40.
5Discuter avec Alpha Condé, ce sera alors lui donner un pouvoir et une légitimité qu’il n’aura plus, puisqu’il les aura usurpés. C’est donc en usurpateur qu’il faudra le traiter et non en chef d’État, car si on lui reconnaît le moindre pouvoir, pourquoi voudriez-vous qu’il ne s’en serve pas à son profit ?
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