L'Amérique et la réélection de Barack Obama, vues de Conakry par le président guinéen Alpha Condé

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« Je suis convaincu que son premier mandat, étant donné les problèmes auxquels les Etats-Unis étaient confrontés, il ne pouvait pas (faire grand chose pour l'Afrique). Mais comme c'est son deuxième mandat, et qu'il n'aura plus à se représenter, je crois qu'il pourra mener la politique africaine telle qu'il l'avait défini à Accra... Et s'engager d'avantage dans la promotion de la démocratie en Afrique ».

RFI : La victoire de Barack Obama, est-ce que vous l’espériez ?

Alpha Condé : Bien sûr, parce que le président Obama nous a reçus à Washington – le président Alassane, le président Issoufou et moi – et il a pris beaucoup d’engagements avec la Guinée, et suit personnellement l’exécution de ses engagements. Et nous sommes très satisfaits de la coopération, parce que tous les engagements qu’il a pris, l’ambassade est en train de les exécuter, tant dans le domaine de la réforme des forces de sécurité que dans le domaine du renforcement de la coopération.

Vous savez, les Américains ont été les premiers à annoncer qu’ils vont annuler 100 % de leurs dettes. Donc je suis très satisfait de son élection. Et j’espère que les relations vont encore davantage se renforcer avec la Guinée.

Mais vous n’êtes satisfait que sur le plan bilatéral entre la Guinée et les Etats-Unis ?

Non, je suis convaincu que son premier mandat, étant donné les problèmes auxquels il était confronté aux Etats-Unis, il ne pouvait pas, mais comme c’est son deuxième mandat et qu’il n’aura plus à se présenter, je crois qu’il pourra mener la politique africaine telle qu’il l’avait définie à Accra, parce que, comme il n’a plus d’élection, donc il peut mener une politique plus librement.

Vous pensez que pendant ce premier mandat il était contraint ?

Ah bien sûr ! Vous savez, le mandat quatre ans c’est très court ! Il fallait d’abord qu’il s’occupe des problèmes américains. Mais maintenant qu’il a été réélu… Il a tenu un bien grand discours à Accra, et n’oubliez pas qu’il a dit que l’Afrique a plus besoin d’institutions solides que d’hommes providentiels. Donc ça veut dire qu’il va nous aider à avoir ensembles des institutions solides et démocratiques pour qu’on sorte des élections truquées et qu’il y ait le respect des droits de l’homme.

Donc ce que vous attendez de lui, peut-être, pendant ce deuxième mandat, c’est de hausser le ton à l’égard des dictatures et des régimes qui truquent les élections, c’est ça ?

C’est de s’engager davantage dans la promotion de la démocratie en Afrique.

Quels sont les pays sur lesquels vous avez trouvé Barack Obama un petit peu trop frileux, peut-être, pendant son premier mandat et où vous l’attendez maintenant ?

Vous savez, je préfère ne pas faire de commentaires. C’est de la responsabilité des Américains. Ce que moi je souhaite seulement, c’est qu’il soit fidèle à son discours qu’il a tenu à Accra et qu’il le mette en application.

Et sur le plan économique, est-ce que vous avez été un petit peu déçu, ces quatre dernières années ou pas ?

Je pense que les Africains attendaient beaucoup d’Obama. Mais comme je l’ai dit après son élection, Obama est d’abord américain, même s’il est d’origine africaine. Mais je suis convaincu qu’il a une grande sensibilité pour le respect de la démocratie et la promotion de l’Afrique. Et je suis convaincu que, n’étant plus sur une réélection, il aura une politique africaine plus dynamique. En tout cas, en ce qui concerne la Guinée, sa politique est très dynamique.

Pendant son premier mandat, Barack Obama n’a fait qu’une très rapide incursion en Afrique subsaharienne – vingt-quatre heures au Ghana – est-ce que vous n’attendez pas un petit peu plus pour son deuxième mandat ?

Mais nous espérons qu’il fera un peu plus de voyages en Afrique, pour mieux s’imprégner des réalisations africaines, parce que je crois qu’aujourd’hui le monde entier est convaincu que l’Afrique est l’avenir du monde. Donc, lui comme d’autres, je pense qu’il se trouve dans la lutte pour l’accès aux matières premières. Je suis convaincu qu’il fera plus de voyages en Afrique.

Peut-être ira-t-il sur la tombe de son père, au Kenya ?

Ah ça, c’est trop personnel. Je ne peux pas apprécier.

Mercredi, le président Mahamadou Issoufou disait : « La première fois, en 2008, l’élection d’Obama pouvait être un accident. La seconde fois, aujourd’hui, c’est la preuve que ce n’est pas un accident ! »

Bien sûr ! Parce que la première fois tout le monde a été surpris que les Américains puissent élire un Noir. Etant donné qu’on pensait que c’est un pays très raciste. Donc on pouvait penser que c’est un accident de l’histoire. Mais sa réélection, surtout avec la marge avec laquelle il a gagné, ça montre que réellement, c’est une volonté des Américains.

Et ça, est-ce que vous vous en êtes aperçu, quand vous êtes allé à différentes conventions démocrates ?

Moi, je vais aux conventions démocrates depuis la première convention qui a choisi Clinton comme président. Donc, je suis convaincu qu’après son élection, Obama va davantage s’intéresser aux problèmes africains et renforcer l’aide américaine à l’Afrique.

Dans son discours de victoire, Obama a eu cette phrase, à l’adresse de ses compatriotes : « Vous avez fait de moi un meilleur président, depuis quatre ans ». Est-ce que les Guinéens ont fait de vous un meilleur président depuis deux ans ?

Posez la question aux Guinéens. Ce n’est pas moi qui vais répondre à ça ! (Rires)

Question de politique intérieure : dans quels délais les Guinéens vont-ils pouvoir élire leurs députés ?

Bon… Vous savez que la Céni a été mise en place de façon consensuelle. Le bureau a été mis en place. La Céni va nous proposer un chronogramme, et en fonction de ce chronogramme, je convoquerai les élections. Parce que je vous ferai remarquer que c’est la Céni qui propose le chronogramme. Moi je ne fais qu’entériner par décret. La Céni est consensuelle, tout le monde est représenté. Le président a été mis en place, les deux vice-présidents, le trésorier, le rapporteur, et la Céni a commencé ses séances plénières.

Et je pense que bientôt la Francophonie va venir, pour suivre l’exécution des questions techniques, et la Céni va me proposer, donc, un chronogramme. Et j’espère que ce chronogramme me permettra d’aller assez rapidement aux élections, mais en tenant compte des dates imposées par la Constitution. Je dois convoquer les élections soixante-dix jours avant.

Il reste un point de blocage. C’est le débat sur l’opérateur technique, chargé de réviser les listes électorales…

Non, il n’y a aucun débat ! Il n’y a aucun débat ! C’est vous qui dites ça ! Ce sont les journalistes qui parlent de ça ! Il y a eu une réunion ici, au Novotel. Tout le monde était présent. Les partis politiques, etc. Il a été très clair que Way Mark peut faire. Donc pour moi, il n’y a aucun problème. Et je pense qu’on va aller aux élections. L’OIF viendra constater que Way Mark fait parfaitement son travail. Donc le problème essentiel, c’était résoudre le problème de la Céni. Il n’y a plus aucun problème.

Interview audio -

Source: RFI

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