Guinée: le scénario du pire?

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… Et le second tour de «l’historique élection présidentielle» de Guinée, celle-là même qui devait réconcilier les cœurs et inscrire le pays dans une nouvelle dynamique de démocratie et de développement, a fait flop! Les bureaux de vote n’ont pas ouvert leurs portes le 19 septembre 2010, et les urnes, toujours entachées des irrégularités du déjà lointain premier tour, attendront encore quelques semaines pour recueillir les bulletins des électeurs. Si jamais ce second tour de tous les espoirs et de toutes les polémiques finit par se tenir.

Après avoir reporté le scrutin aux calendes guinéennes, on se hâte lentement pour remettre la machine en ordre de fonctionnement. Et, selon certaines sources, l’élection la plus controversée de Guinée pourrait finalement se tenir le 3 ou le 10 octobre prochain, soit un décalage de deux à trois semaines. Les démons de la division et des violences, qui se sont emparés de la campagne électorale s’apaiseront-ils d’ici à là? Et le niveau de préparation du scrutin par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), jugé insuffisant, marquera-t-il les points souhaités pour un engagement plus serein dans la compétition. Le moins que l’on puisse dire pour l’instant, c’est que, malheureusement, la Guinée a raté un virage historique important. Ce pays avait, en effet, la formidable occasion de se confectionner un destin démocratique tout neuf et, du reste, les longues files agglutinées devant les bureaux de vote le 27 juin 2010, à la faveur du premier tour de la première véritable élection démocratique organisée en Guinée depuis 1958, attestent de l’envie des populations de jouer leur partition dans ce renouveau. Mais c’était sans compter avec les acteurs politiques qui n’ont eu de cesse d’empoisonner l’atmosphère de cette démarche généreuse et historique. Les cris de contestation et de remise en cause des résultats du scrutin seront bientôt suivis de manœuvres diverses qui ont fini par déliter le climat général et prendre en otage un processus il est vrai imparfait, mais qui a su s’amender au plus fort de la tourmente.

Et si presque trois mois après un premier tour jugé chaotique, on en est venu, à force de patience et de compromis, à un consensus minimal sur la finalisation du processus, croyant laisser le pire derrière, on est bien vite revenu, de façon encore plus cruciale, dans le cercle de feu de la tempête électorale. Malgré la signature, à Ouagadougou, d’un protocole de bonne conduite pour pacifier le déroulement du second tour et jeter les bases d’une période postélectorale apaisée, l’élection tant attendue cale à nouveau sur des affrontements inter-partisans. Aujourd’hui encore, Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo ne sont pas sur la même longueur d’ondes quant à l’organisation et à la tenue effective du duel qui est censé les départager. Tandis que le candidat de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), arrivé largement en tête du premier tour, insiste  sur la nécessité d’«organiser le second tour dans les brefs délais», Alpha Condé, «opposant historique» et candidat du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), martèle, lui, qu’il faut «laisser la Commission électorale travailler».
Deux thèses qui s’affrontent sur fond de défiance, et qui pourraient bien conduire à une impasse si rien n’est fait pour dégeler la situation. En tout cas, pour Alpha Condé, le challenge est on ne peut plus clair. «Si les élections ne sont pas transparentes, il y aura des troubles et c’est l’armée qui reprendra le pouvoir.
Mais si la Céni règle les dysfonctionnements, il n'y aura aucun trouble et la Guinée pourra se développer», a-t-il argumenté. Il reste cependant à savoir, au train où vont les choses, à quel moment l’on jugera enfin la Ceni suffisamment prête, pour que le principe de la transparence a priori du scrutin soit acquis, parce que les «dysfonctionnements» auront été définitivement corrigés.
Pour l’heure, en tout cas, l’attente perdure, l’inquiétude enfle et, après avoir suscité tant d’espoirs, les risques d’un enlisement du processus de sortie de crise en Guinée sont grands…

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