Guinée : chronologie d'une faillite électorale et démocratique
- Par Administrateur ANG
- Le 10/11/2020 à 07:49
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BILAN. Les principaux développements politiques en Guinée depuis l'élection contestée du 18 octobre dernier illustrent une véritable situation de coma démocratique.
- Le vote :
Le 18 octobre, les Guinéens votent pour choisir leur président, dans le calme, mais aussi l'inquiétude, après des mois de contestation meurtrière contre un troisième mandat d'Alpha Condé. Les favoris sont le chef de l'État sortant, 82 ans, et le leader d'opposition Cellou Dalein Diallo, 68 ans. Avant même le début de la comptabilisation, l'opposition dénonce des bourrages d'urnes et des obstructions faites à la présence de ses représentants dans des bureaux de vote.
- Cellou Diallo proclame sa victoire :
Dès le lendemain, Cellou Dalein Diallo, candidat pour la troisième fois, revendique sa victoire, sans attendre les résultats officiels, suscitant des hurlements de joie de ses partisans. Cette proclamation est « nulle et de nul effet », déclare le vice-président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Le parti du président sortant, le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), condamne une « déclaration irresponsable et dangereuse ».
- « Fraude à grande échelle » :
Le 20, le principal parti d'opposition, l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) de M. Diallo, dénonce une « fraude à grande échelle » afin de le priver de la victoire. Des observateurs de l'Union africaine et de la Communauté économique des 15 États de l'Afrique de l'Ouest – dont la Guinée est membre – jugent que l'élection s'est déroulée de manière régulière.
- Violences :
Le 21, des heurts opposent des partisans de M. Diallo et les forces de l'ordre à Conakry. Dans une vidéo, M. Diallo affirme avoir remporté 53 % des suffrages. Il se dit séquestré à son domicile par un fort déploiement policier. Le siège de l'UFDG est placé « sous scellés » en vertu d'une procédure judiciaire ouverte parce que « des messages contraires à l'ordre public et à l'unité nationale ont été diffusés ». Le 22, la banlieue de Conakry et plusieurs villes de province sont de nouveau le théâtre de tirs et de heurts entre partisans de l'opposition et forces guinéennes. La télévision nationale déclare que les autorités ont réquisitionné l'armée.
- La Ceni déclare Condé vainqueur :
Le 24, la Ceni annonce qu'Alpha Condé a gagné la présidentielle avec 59,5 % des voix, selon des résultats encore provisoires. Cellou Dalein Diallo a obtenu 33,5 % des suffrages, selon la commission. « Nous allons quand même saisir la Cour constitutionnelle, sans se faire trop d'illusions », déclare l'opposant, qui parle de « hold-up électoral ». Des affrontements éclatent entre forces de l'ordre, qui font usage de gaz lacrymogènes, et manifestants.
- « Interrogations » :
Le 27, le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell, affirme prendre « note » de la victoire annoncée d'Alpha Condé. Mais il ajoute que « des interrogations demeurent quant à la crédibilité du résultat ». Le 28, la France, ancienne puissance coloniale, exprime sa « préoccupation », estimant que les doutes sur la crédibilité des résultats doivent être « levés de façon transparente ». Le pouvoir allège le dispositif sécuritaire en place depuis la présidentielle, notamment autour du domicile du chef de l'opposition.
- L'opposition conteste :
Le 2 novembre, quatre candidats déclarés perdants, dont M. Diallo, saisissent la plus haute juridiction du pays pour contester la victoire d'Alpha Condé. Le 6, l'UFDG dénonce une « vague de terreur » orchestrée par le pouvoir entre le 19 octobre et le 3 novembre. « Le bilan provisoire de cette répression est de 46 morts, près de 200 blessés par balles, une centaine d'arrestations », selon l'UFDG. D'après le gouvernement, les violences ont fait 21 morts, dont des membres des forces de l'ordre.
- Condé proclamé vainqueur :
Le 7, la Cour constitutionnelle rejette les recours de M. Diallo et de trois autres des 12 candidats à la présidentielle et proclame Alpha Condé définitivement vainqueur. M. Diallo persiste à dire avoir gagné la présidentielle et appelle ses partisans à défendre cette victoire « par tous les moyens légaux ».
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