Faya Millimono fait le bilan des cinq ans de la transition et énumère des pistes de sortie crise
- Par Administrateur ANG
- Le 17/11/2013 à 18:17
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Avant de dresser le bilan des cinq années de transition dont le présent document fait l’objet, permettez-nous d’adresser vivement notre profonde reconnaissance à l’ensemble de la communauté internationale, particulièrement la CEDEAO, le système des Nations Unies en Guinée, l’Union Européenne, l’Organisation Internationale de la Francophonie, les Etats-Unis d’Amérique, et les acteurs guinéens comme la société civile et toutes les personnes éprises de paix pour avoir considérablement contribué à l’apaisement durant cette période.
Ce document est donc la synthèse de cinq ans de transition guinéenne. Il comporte deux parties :
- le bilan des cinq ans de la transition politique guinéenne (décembre 2008 et novembre 2013) ;
- et les pistes de solutions formulées par le Bloc Libéral.
- I.Du Bilan des cinq ans de la transition politique guinéenne (décembre 2008 - novembre 2013)
La situation sociopolitique et économique de la Guinée s’est davantage détériorée durant les cinq dernières années. La pauvreté est encore plus marquante qu’elle ne l’était il y a dix ans et la situation des Guinéens devient de plus en plus précaire. En effet, la misère économique et sociale ne cesse de croitre dans l’ensemble du pays et concerne plus particulièrement les populations des zones rurales. Globalement, la pauvreté s’est accrue et passe de 53% en 2007 à 55,2% en 2012 selon les sources nationales. Bref, la situation macro-économique et politico-sociale du pays est chaotique. L’accès des populations aux services sociaux de base notamment les soins de santé, l’électricité, l’eau, les voies de communication est encore plus faible qu’avant.
Pourtant, à la mort du Général Président Lansana Conte le 22 décembre 2008, un constat faisait déjà consensus au sein de la société guinéenne: le pays est en faillite à la fois morale, économique, politique et sociale. Les critiques pointaient du doigt la mal gouvernance et ses corollaires (la corruption, les détournements de fonds publics, l’impunité, etc.). On a aussi indexé l’insécurité, les violations des droits humains, le chômage, les injustices de toute sorte, le népotisme, l’ethnocentrisme, l’omni présence de l’exécutif, la faiblesse des pouvoirs législatif et judiciaire, etc.
En outre, la prise du pouvoir par le Conseil National pour la Démocratie et le Développement (CNDD) avait été considérée par certains Guinéens comme une bonne occasion de faire l’état des lieux, de moraliser la vie publique, d’opter pour un système politique plus adapté aux réalités sociologiques du pays et de redéfinir les règles de jeu démocratique beaucoup plus inclusif, participatif, équitable et juste. Ceux-là ont conseillé tout d’abord d’éviter la précipitation. Ils ont pensé que, dans la précipitation, c’est encore une fois une décision importante sur l’avenir de la Guinée qui se prendrait sans consulter le peuple, donc sans référendum, sous prétexte d’un manque de temps. Pour peu qu’on se donne le temps d’y réfléchir aujourd’hui, de manière rétrospective, l’on comprend qu’il y a eu de facto une répétition de l’histoire, la conquête d’un idéal qui a démontré ses défaillances, donc la remise en place du système qui a fait défaut.
Beaucoup de Guinéens avaient appelé à l’organisation d’une conférence nationale souveraine rassemblant l'ensemble des forces vives du pays pour répondre collectivement à la question de savoir pourquoi la population d’un pays aussi potentiellement riche que la Guinée végète-t-elle dans la misère depuis l’indépendance ? Plus loin, certains guinéens avaient même fait appel aux exemples de transition au Bénin et au Mali pour persuader les acteurs sociopolitiques.
Malheureusement, cette position emprunte de sagesse n’aura pas été prise en compte par la majorité de la classe politique guinéenne. Celle-ci a fait de la transition politique guinéenne une affaire exclusivement électorale. Or, une conférence nationale aurait sans doute permis de faire l’état des lieux et de décider des réformes constitutionnelles nécessaires pour réorganiser totalement la vie politique guinéenne.
Aujourd’hui, la publication des résultats définitifs des élections législatives du 28 septembre 2013 par la Cour Suprême, met un terme à la longue période transitoire. C’est donc le moment de dresser un bilan de cette tumultueuse période.
En effet, le système politique consacré par la constitution de mai 2010 est-il différent de celui d’avant la transition ? Ce système est-il plus adapté à la diversité ethnoculturelle de notre pays ? Quels jalons avons-nous posés pour permettre plus de justice, d’égalité, de participation, de liberté, d’unité, d’harmonie et de paix entre les Guinéens ? Sachant le constat d’échec de la pratique de gouvernement reposant sur un seul individu, quelles corrections les cinq années de transition ont-elles réalisé ? Le guinéen a-t-il le sentiment d’être plus en contrôle de son devenir aujourd’hui qu’avant ? Peut-on dire que les Guinéens se font plus confiance aujourd’hui qu’hier ? Ce sont là quelques questions que nous sommes en droit de nous poser.
Les réponses nous renvoient aux principaux faits qui ont marqué la période transitoire. Ce sont :
1. Une constitution bâclée. En règle générale, une constitution fait l’objet de débat et de consultation du peuple. Cependant, en Guinée, l’on s’est contenté de faire élaborer la Constitution à la hâte par le Conseil National de la Transition (CNT). Un organe dont les membres n’avaient aucune légitimité représentative du peuple. Le peuple n’a donc été consulté ni durant la conception et l’élaboration ni durant l’adoption de la constitution. C’est par ordonnance signée par un général de l’armée faisant office de chef d’Etat intérimaire que cette Constitution a été promulguée.
Or, la constitution étant un contrat social, elle doit faire l’objet de consensus pour permettre à l’action politique d’être efficace et capable de résoudre les problèmes qui se posent à la société toute entière. Sans risque de se tromper, on peut dire que la nouvelle constitution guinéenne n’a apporté de vraies solutions aux nombreux problèmes relatifs à la méfiance interethnique, à la centralisation à outrance du pouvoir, à la tribalisation de la vie politique, etc.
Par contre, l’une des innovations de la nouvelle Constitution est l’augmentation de la charge du contribuable guinéen à travers la création d’un poste de Premier Ministre dit chef de gouvernement qui, dans la pratique, n’est même pas le premier des ministres. En pratique, il n’est fondé d’aucun pouvoir de décision. C’est aussi le cas de la création du poste de Médiateur de la République, de la multiplication au sommet des organes judiciaires (Cour Suprême, Cour Constitutionnelle, Cour des Comptes, etc.). A part le fait que ces nouveaux postes créent plus de bouches à nourrir par le peuple, leur pertinence et leur efficacité dans la pratique reste à prouver.
Une autre innovation est la consécration de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) comme un organe constitutionnel « seul » en charge de l’organisation des élections politiques et référendaires en République de Guinée. Cependant, les caractères partisan et non paritaire de cet organe et les ingérences nuisibles des membres du gouvernement et des administrateurs centraux et territoriaux l’ont condamné à l’incapacité d’organiser des élections libres, transparentes et crédibles.
Malgré le fait de faire élire les gouverneurs (une autre innovation) en plus des maires qui l’étaient déjà, la centralisation à outrance du pouvoir faisant du Président de la République le seul maitre à bord, n’aura rien changé au mal guinéen.
Le système politique en cours en Guinée (le système présidentialiste), dans sa structure et sa philosophie de l’exercice du pouvoir politique n’est pas adapté à la structure démographique composite de nos populations. Celles-ci ont des échelles de valeurs sociales, politiques et économiques diverses. Dans un pays aux sociétés plurielles comme la Guinée, la démocratie présidentialiste institue de fait la dictature constitutionnelle. Depuis son amorce en 1993, la démocratie présidentialiste n’a amené que l’instabilité politique et les troubles sociaux dans notre pays. Pire, elle a aggravé l’ethno régionalisme et induit la violation des droits fondamentaux des citoyens et la hausse de crimes politiques. En résumé, la démocratie présidentialiste a attisé la flamme de la compétition malsaine et du conflit interethnique, et du combat entre les partis politiques qui sont, dans la majorité des cas, d’obédience ethno-régionale.
2. Des consultations électorales sur fond de fraudes (présidentielle 2010 et législatives 2013)
Sous le régime du Général Lansana Conte notamment, les Guinéens ont tous été témoins des critiques des plus acerbes à l’encontre des fraudes électorales. A l’occasion de la transition politique qui s’achève, chacun a rêvé de voir cette pratique s’inscrire dans le passé, mais c’était sans compter avec la tradition devenue légendaire en République de Guinée (cf. Dossier – La « malédiction » des fraudes électorales ; Guineenews.com, Octobre 2013).
Une autre caractéristique de ces consultations, elles n’ont suscité aucun débat d’idées. D’où, comme dans le passé, le choix des électeurs n’a pas été fait en fonction de la pertinence des projets de société ou des programmes des partis ou des candidats, mais en fonction de leurs appartenances ethniques.
Comme conséquence, le premier « élu » de cette transition (le Président de la République), qui finit la troisième année de son mandat, a un bilan qui se passe de commentaire, tellement il est catastrophique à tout point de vue. L’instrumentalisation des ethnies et des régions à des fins politiques est sa méthode de gouvernance par excellence. Cette situation accroit la division, la méfiance et des fois des conflits interethniques. L’exclusion, l’impunité, les injustices de toute sorte, la mal gouvernance et ses corollaires de corruption et de détournement de deniers publics font légion. La pauvreté, le chômage et l’insécurité vont crescendo.
Par les pouvoirs qui lui sont conférés par la constitution et par sa façon de gouverner, le Président « élu » de la transition ressemble étrangement aux dictateurs que les Guinéens ont passé un demi-siècle à combattre, faisant des milliers de victimes. D’où la remise en place du système qui a fait défaut.
Si le bon sens nous enseigne que les mêmes causes produisent les mêmes effets, l’on peut affirmer sans trop de risque de se tromper que l’Assemblée qui sera bientôt installée ne sera pas différente de celles qu’on a connues dans le passé. Les Guinéens ne devront donc pas s’étonner qu’elle (l’Assemblée Nationale) ne soit pas capable de contrôler l’action du gouvernement. Pire, elle ne tardera pas à devenir une caisse d’enregistrement des demandes de l’exécutif.
3. Le double jeu du pouvoir judiciaire. A l’issue du premier tour des élections présidentielles du 27 juin 2010, la Cour Suprême, dans la même composition, s’est montrée compétente en annulant des circonscriptions entières (Matam et Ratoma) et beaucoup de bureaux de vote dans plusieurs autres circonscriptions. Cela a changé du tout au tout le résultat final de la présidentielle de 2010. Cependant, pour les législatives du 28 septembre 2013, la même cour se déclare incompétente. C’est un déni de justice et un recule dangereux, qui provoque une crise de confiance envers justice. Cette ambivalence juridique perpétuée par la Cour Suprême rappelle les deux poids deux mesures des cours et tribunaux de niveaux inferieurs. Cela montre très éloquemment la perpétuation du système que combat le peuple de Guinée depuis l’accession du pays à l’indépendance.
4. La mal gouvernance perpétuée. Ceux des Guinéens qui espéraient que la corruption, les détournements de deniers publics, l’impunité, l’insécurité et l’injustice seraient définitivement derrière eux en ont eu pour leur compte. Il suffit de jeter un coup d’œil sur la gestion catastrophique et mafieuse des ressources minières, les scandales de détournements de fonds publics, l’octroi des marchés publics exclusivement de gré à gré, les injustices dont sont quotidiennement victimes les Guinéens et les nombreuses attaques à main armée faisant tous les jours de nombreuses victimes dans les villes et sur les routes pour s’en convaincre.
5. Le tissu social en lambeau. Jamais dans l’histoire de la Guinée indépendante, l’unité nationale n’aura étémalmenée autant que durant cette période transitoire. Alors que certains rêvaient d’un début de réconciliation nationale durant les années de transition pour se poursuivre au delà, l’on aura vécu exactement le contraire. De la politique de tribalisation à outrance à travers les alliances naturelles durant les élections présidentielles de 2010 aux affrontements interethniques à Galapaye, Gueckédou, N’Zérékoré, Beyla et Conakry, en passant par des accusations d’empoisonnement et de « complots ethniques », et la stigmatisation de groupes ethniques, la transition aura laissé le tissu social en lambeau.
6. Les droits et les libertés bafoués. C’est durant cette période transitoire qui s’achève qu’on aura enregistré les plus graves violations des droits et des libertés allant jusqu’aux crimes contre l’humanité. En voici quelques exemples les plus marquants :
- les arrestations suivies de torture et de détention arbitraire des milliers de civiles et militaires,
- les massacres de centaines de civiles et les violes de dizaines de femmes en situation d’exercice de liberté (le 28 septembre 2009, les manifestations pacifiques de l’opposition en 2011, 2012 et 2013, les pseudos complots jamais prouvés, le massacre du 3 au 4 août 2012 des populations de Zoghota, etc.),
- la culpabilisation des droits constitutionnels de manifestations et de cortèges,
- les nombreuses atteintes de la liberté de la presse, etc.
7. La situation économique catastrophique. Alors que les Guinéens s’attendaient à une amélioration de leurs conditions de vie, c’est durant la transition qui s’achève que les acquis ont volés en éclat, en dépit de l’obtention du PPTE, de la stabilisation de la monnaie et du taux d’inflation. La fermeture de la SOTELGUI, de l’usine de Fria, des Grands Moulins de Guinée, de la BADAM, la faillite de GUICOPRESS, de FUTURELEC, et le départ de plusieurs compagnies minières (BSGR, Biliton, Vale, etc.) ont occasionné la perte de milliers d’emplois, l’aggravation de la pauvreté et l’augmentation vertigineuse du chômage, surtout des jeunes. L’augmentation du prix des hydro carbures a provoqué la montée en flèche de la cherté de la vie. Dans les secteurs de l’eau et de l’électricité, non seulement aucune promesse n’a été tenue par le président « élu », mais plus grave, le « tour – tour » a cédé la place à « jamais ».
Ce bilan macabre de la transition avait été vu de loin par certains partis politiques dont le Bloc Libéral. En effet, voyant l’échec de la transition se préciser, le Bloc Libéral avait pourtant proposé des solutions à temps. C’était en février et mars 2013, dès après l’obtention de son agrément, que le BL a rendu publique ces propositions. Elles portaient sur :
- 1)le couplage de toutes les élections en 2015 ;
- 2)le lancement d’un débat national permettant d’établir le diagnostic du mal guinéen ;
- 3)l’amorce de la réconciliation nationale ;
- 4)les reformes constitutionnelles susceptibles de favoriser l’adoption d’un système politique plus adapté aux réalités ethnoculturelles de la Guinée ;
- 5)la mise en place d’une commission électorale nationale indépendante technique et non partisane, d’une administration électorale de la base au sommet et complètement à l’abri des ingérences nuisibles des membres du gouvernement, des administrateurs centraux et territoriaux, et des structures décentralisées ;
- 6)le recrutement d’un nouvel opérateur chargé de l’établissement et de la gestion du fichier électoral ;
- 7)la mise en place d’un gouvernement d’union national chargé d’achever la transition ; etc.
Si le Bloc Libéral avait été écouté, ces élections législatives qui sont aujourd’hui jugées de frauduleuses aussi bien par la classe politique de tout bord que par les observateurs guinéens et étrangers auraient pu être mieux organisées en les couplant avec les présidentielles et les municipales en 2015. Cela aurait permis d’organiser un débat national qui aurait débouché sur un état des lieux des 55 ans d’indépendance de la Guinée et de jeter les bases d’un système politique mieux adapté aux réalités socioculturelles et d’un jeu démocratique plus inclusif, participatif, juste et respectueux de la dignité humaine, des droits fondamentaux et des libertés fondamentales de l’homme.
Face à ce bilan, disons que les Guinéens viennent encore de rater une autre occasion de penser collectivement leur société, d’identifier les maux dont elle souffre et de trouver des solutions les plus appropriées. Pire, l’élite guinéenne ne semble même pas se rendre compte de l’échec de la pratique de gouvernement reposant sur un seul individu, qui caractérise le pays depuis son accession à l’indépendance en 1958. C’est pourquoi, cette période transitoire aura été de facto caractérisée par une répétition de l’histoire, la conquête d’un idéal qui a démontré ses défaillances, donc la remise en place du système qui a fait défaut.
Le système qui a fait défaut est en place depuis 55 ans. Durant toutes ces années, il a été incapable de créer une nation, de cultiver la confiance entre les fils et les filles de Guinée, d’encourager la participation citoyenne à l’édification de la nation, de libérer le génie créateur des Guinéens, de résoudre les tensions politiques et sociales, et de garantir une alternance normale sans coup d’État militaire. Il est donc plus que jamais temps que ce système cède sa place à un autre plus adapté aux réalités sociologiques de la Guinée, plus démocratique.
Le Bloc Libéral est convaincu que les frustrations qui ont été à l’origine des manifestations durant les dix dernières années de la présidence du Général Lansana Conte et durant la période transitoire ne tarderont pas à refaire surface dans les jours, semaines, mois et années qui vont suivre. Quand ce moment arrivera, le peuple de Guinée comprendra qu’aucune des institutions engendrées par la transition (la présidence actuelle de la République, l’Assemblée nationale sortie du scrutin du 28 septembre 2013, les institutions judiciaires prévues par la Constitution, etc.) ne sera efficace pour y faire face.
Sachant donc ce qui va caractériser notre pays dans les jours, semaines, mois et années à venir, le Bloc Libéral promet de continuer à se battre au côté du peuple de Guinée pour le triomphe de la vérité, de la justice, de la liberté, de l’égalité en droits et en devoirs de tous les Guinéens.
Face à ces défis et enjeux à venir, le BL propose des pistes de solutions ci-dessous.
II. Des pistes de solutions
Le Bloc Libéral estime qu’en tant que formation politique conséquente et patriote, il ne suffit pas de faire la liste des problèmes qui affligent notre pays. Il faut aussi et surtout faire des propositions de solutions. C’est l’objet de cette seconde partie.
Du besoin de Conférence Nationale
Pour faire le diagnostic du mal guinéen en vue de trouver des remèdes conséquents et appropriés, il faudrait passer par l’organisation d’une conférence nationale. Les participants à la conférence nationale seraient : les partis politiques, les corporations professionnelles ainsi que les syndicats, les représentants de la société civile, les clergés Catholiques et Musulmans, les représentants de l’armée et des corps paramilitaires. A cet égard, le Bloc Libéral se proposerait de définir les termes de références d’une telle conférence nationale.
Du besoin d’un nouveau modèle de gouvernement
Pendant longtemps, la classe politique Guinéenne et la majorité de la population ont cru que la racine du problème Guinéen réside entièrement en la personne des présidents qui se sont succédés à la tête de l’Etat Guinéen. En fait, le problème de notre pays réside dans la pratique du modèle de démocratie présidentialiste. Après de profondes analyses, et une étude comparée de différents types de gouvernements dans le monde, le BL est convaincu que la sempiternelle profonde crise de notre pays est plutôt de nature systémique. Le problème est causé à 80% par le système de gouvernement en pratique dans le pays depuis l’indépendance. Un modèle de gouvernement est un système politique ; c’est-à-dire une organisation qui a des composantes institutionnelles qui s’articulent et fonctionnent de manière unitaire pour la gestion d’un pays. Comme tout système, la structure et le mécanisme de fonctionnement d’un gouvernement ainsi que la philosophie qui le régissent définissent la nature et le poids de chacune des institutions qui la composent.
Le BL est convaincu que le problème Guinéen se situe au niveau du système de gouvernement et bien au-delà des personnalités individuelles des chefs d’Etats qui ont gouverné le pays, depuis 1958 ; ce qui n’enlève en rien la responsabilité individuelle de ces chefs d’Etats. C’est pourquoi le parti propose d’explorer d’autres modèles de démocraties afin d’adopter celui qui serait le mieux approprié à la sociologie politique de notre pays. Mais pour se faire, il faudrait refondre la constitution et la faire adopter par referendum.
Le Peuple de Guinée, à cause de sa diversité ethnique doit adopter un modèle de démocratie à la fois participative et intégrative. Un modèle qui tienne compte des échelles de valeurs sociales, politiques et économiques de ses diverses composantes sociales. Un modèle de démocratie qui induit la coopération et la communion entre les différentes ethnies et régions de la Guinée. Un modèle qui repose sur le consensus entre les partis politiques quant à la gestion du pouvoir en Guinée. C’est seulement un gouvernement issu de ce modèle de démocratie qui ramènera la stabilité multidimensionnelle dans notre pays et amorcera l’essor de développement économique pour tous les Guinéens sans discrimination ethnique ni régionale.
Dans un document ultérieur, le Bloc Libéral présentera au peuple de Guinée un modèle approprié de démocratie. La sagesse séculaire enseigne : Novum tempus exigne novum politia. Un temps nouveau exige une nouvelle organisation politique.
Du besoin de refonte de la Constitution et Son adoption par Référendum
Le creuset de moulage de tout régime démocratique est la constitution. Le BL est convaincu de la nécessité de réécrire la constitution Guinéenne afin que son contenu cadre avec les valeurs de la sociologie de nos sociétés composites, tout en s’alignant avec les valeurs cardinales de la démocratie. Cette nouvelle constitution, pour être le reflet de la perception et de l’interprétation des règles sociales doit absolument être adoptée par referendum populaire. Les coûts en finance, ressources humaines, et temps seront largement justifiés par la solidité de l’essence de cette constitution. Cette mesure confèrera au peuple sa souveraineté. Sans souveraineté le peuple n’est pas libre
Du Respect des Droits et des Libertés
Le BL est convaincu que pour assurer le respect des droits fondamentaux et des libertés fondamentales des citoyens, il faut que le système de justice ne soit plus qu’un appendice de l’exécutif, qui se résume au président de la République qui, dans le modèle de démocratie en cours en Guinée, est omnipotent. Le système judiciaire doit être autonome et indépendant pour assurer l’application des lois sans aucune influence de quelques sources que ce soit.
L’indépendance de la justice sera non seulement celle vis-à-vis des pouvoirs exécutif et législatif, mais également celle du magistrat vis avis sa hiérarchie.
Du besoin de formation Civique
La démocratie est un instrument de gestion politique qui assure la participation de la majorité des citoyens au choix des leaders politiques. Mais pour que la démocratie, dans son format occidental que nous connaissons actuellement fonctionne bien en Guinée, les populations ont besoin d’en comprendre la nature, sa structure et son mécanisme de fonctionnement. Nul ne peut manier avec aisance un instrument qu’il ne connait pas. C’est dans cette optique que le Bloc Libéral encouragerait une éducation civique à l’ intention de la classe politique et des électeurs des quatre régions de notre pays. Outre cette formation ad hoc qui devait avoir lieu avant l’élection présidentielle prochaine, il faudrait concevoir un programme de formation civique qui couvre le cycle du lycée. Ceci permettrait de former le citoyen guinéen (différents du militant) et de préparer les futurs électeurs à exercer leurs droits de citoyens en toute rationalité.
Du besoin de réconciliation nationale
Pour raccommoder le tissu social qui est largement entamé par les manœuvres politiciennes sous les régimes précédents et sous le régime actuel, il faudrait amorcer le plus tôt possible le véritable processus de réconciliation nationale.
Le premier but d’une réconciliation nationale tel que le Bloc Libéral le conçoit est plutôt pour permettre aux victimes des exactions politiques de se libérer en se confiant à l’ensemble des Guinéens. C’est en fait pour user de la réconciliation nationale comme une catharsis collective qui permettrait de défouler les âmes traumatisées par des décennies d’exactions politiques. Le deuxième but est de faire en sorte que les crimes politiques commis ne se répètent plus jamais dans notre pays. Le troisième but est de conduire les Guinéens à faire un réapprentissage du vivre ensemble et d’établir la vérité et la justice en vue de construire une véritable paix.
De la mise en place d’une véritable administration électorale technique, compétente et indépendante.
Mettre en place une véritable Commission électorale indépendante dotée de compétences et des pouvoirs réels. Celle-ci sera technique à l’image de l’organe en charge des élections au Ghana et dotée d’une administration électorale permanente et indépendante. Celle-ci sera à l’abri des ingérences nuisibles des ministres, administrateurs centraux et territoriaux. Pour ce faire, cela nécessitera une nouvelle loi portant création, organisation et fonctionnement de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) et la révision du Code électoral conformément aux recommandations des observateurs des élections, notamment ces de l’Union Européenne.
Du recrutement d’un nouvel opérateur et élaboration d’un nouveau fichier électoral propre
Il faut procéder au recrutement, en toute indépendance, d’un opérateur compétent et impartial pour élaborer un fichier électoral fiable, à travers une révision du fichier de la Sagem en toute transparence. Les « fameux accords » du 3 juillet 2013 devraient, pour une fois être respectés ne serait ce que pour la facture payée par le peuple de Guinée pour les obtenir.
En conclusion, le Bloc Libéral est d’avis que la solution primaire au problème Guinéen réside dans le changement du modèle de gouvernement en vigueur dans le pays depuis notamment 1958. L’adoption d’un modèle de gouvernement qui coulisserait dans le moule de la sociologie politique des peuples de Guinée mettrait un terme aux luttes hégémoniques interethniques et paverait la voie à la stabilité politique du pays. Mais toute réforme de gouvernement en régime de démocratie passe avant tout par la réforme de la constitution qui est le creuset qui moule le mécanisme de fonctionnement du gouvernement et l’articulation de ses composantes. La connaissance des droits et obligations civiques des citoyens est une condition sine qua non pour l’adoption d’une constitution reformée qui assurerait en essence le respect des libertés et droits fondamentaux des Guinéens sans discriminations ethnique ni régionale.
Faya L. Millimouno
Président du Bloc Libéral (BL)
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