En Guinée forestière, des communautés engagées pour la santé de leur territoire
- Par Administrateur ANG
- Le 29/10/2024 à 12:19
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Entre 2021 et 2024, les communautés villageoises de la préfecture de Nzérékoré, en Guinée Forestière, ont pris part à une initiative ambitieuse, soutenue par le Gret et la Maison guinéenne de l’entrepreneur (MGE) et financée par l’Agence française de développement. Le pari de ce projet ? Améliorer la santé de leur territoire en adoptant l’approche « One Health » qui englobe la santé humaine, animale et celle des écosystèmes. L’objectif était d’accompagner les ménages et les communautés à s’approprier les problématiques locales, à s’organiser et à élaborer leurs propres solutions.
L’approche One health, qu’est-ce que c’est ?
Face à la multiplication des maladies et infections transmises entre les animaux et les humains, l’idée que la santé humaine, celle des animaux (domestiques et sauvages), ainsi que celle des écosystèmes, sont interdépendantes s’impose de plus en plus.
« One Health », ou « Une seule santé », est une approche qui mobilise divers secteurs, disciplines et communautés à tous les niveaux de la société pour travailler ensemble à améliorer le bien-être et lutter contre les menaces pesant sur la santé et les écosystèmes.
Cette approche est souvent promue par des organisations internationales et intégrée dans les stratégies nationales de santé, mais les populations concernées sont rarement pleinement impliquées. En Guinée Forestière, le Gret et la MGE ont tenté de remédier à cette situation en déployant l’approche One Health au niveau local.
En Guinée Forestière, l’intérêt d’une approche One Health à l’échelle communautaire
En Guinée Forestière, épicentre de l’épidémie d’Ebola en 2015 et en 2021, la défiance de la population vis-à-vis du système de santé, longtemps sous-financé, est importante. Dans la préfecture de Nzérékoré, située proche de la forêt classée du Mont Béro, les communautés doivent, par ailleurs, faire face à une série de vulnérabilités. Sous les effets combinés de la pression démographique et de l’intensification agricole, le couvert forestier recule, la biodiversité est menacée, les terres sont dégradées et les eaux polluées.
C’est dans ce contexte que le Gret et la MGE ont lancé un projet visant à opérationnaliser l’approche One Health à l’échelle des ménages ruraux, des villages et des communes, en les mobilisant autour d’enjeux définis, ensemble, comme prioritaires et en les accompagnant dans le changement de pratiques agricoles et d’élevage.
L’une des étapes du projet a ainsi consisté à structurer, accompagner et renforcer des plateformes communales – incluant les autorités locales, les acteurs des secteurs de l’environnement, de l’agriculture, de l’élevage, de la santé, et des représentant∙e∙s des communautés -, et des comités villageois de gestion des terroirs intégrant les enjeux One health.
Les dynamiques participatives créées par le projet ont favorisé une meilleure prise en compte des questions environnementales et de la santé des écosystèmes, encore négligées dans les projets relevant de l’approche One Health. « La stratégie nationale One Health, axée sur la surveillance et la lutte contre les maladies transmises par les animaux, s’écarte parfois des réalités des communautés locales. Notre projet prend en compte leurs priorités, comme la lutte contre la déforestation, la pollution des cours d’eau et la réduction des produits phytosanitaires », explique le Dr Dobo Onivogui, médecin épidémiologiste et chef du projet au Gret. Ainsi, le projet aborde les interactions entre les trois domaines de santé de manière large, tout en intégrant les préoccupations locales en matière de développement économique.
Des résultats concrets
Grâce à ce projet, des professionnels de santé et les communautés ont élaboré une vision commune d’un territoire « en santé ». Les communautés ont également été accompagnées dans la transition agroécologique de trois filières particulièrement à risque : le riz, l’huile de palme et l’élevage porcin. Des changements concrets ont été observés, tels que la réduction des produits phytosanitaires près des habitations, l’adoption de pratiques agroécologiques et de meilleures pratiques d’élevage ou encore la diminution de la coupe abusive du bois.
Jean Delamou, représentant des planteurs de palmiers à huile et secrétaire du comité de gestion villageois de Gouécké témoigne : « Nous avons été accompagnés à gérer nos ressources nous-mêmes, par le dialogue ».
Des formations et des sensibilisations ont été menées par des professionnels de santé et des relais communautaires. L’approche du projet, impliquant les citoyens et les citoyennes a permis de faciliter le travail des agent∙e∙s de santé communautaire. « Avec Ebola, il y avait eu une rupture entre les agents de santé et la population. Avant le projet, l’accès aux communautés était difficile. Maintenant, c’est plus facile de faire passer les messages sanitaires », indique Mamady Kaba Diakité, agent de santé à Gouécké.
Le Gret et la MGE ont contribué à renforcer la résilience des populations en matière de santé globale, grâce à la mobilisation des ménages, des villages et des communes. Les communautés ont démontré leur capacité à agir à leur échelle. Toutefois, « certaines actions nécessitent des moyens humains, techniques et financiers conséquents et la pérennité des cadres de concertation, véritables relais opérationnels des populations et des pouvoirs publics, doit être assurée », alerte Claire Costis, en charge de la thématique One Health au Gret. « Les autorités des différents échelons du pays doivent pouvoir se saisir des enjeux de santé tels qu’ils sont perçus localement et mettre les moyens nécessaires à leur prise en charge effective tout en soutenant les initiatives communautaires ».
Le projet en chiffres :
3 plateformes communales « Une seule santé » fonctionnelles et inclusives
9 comités villageois de gestion des terroirs intégrant les enjeux « One Health »
54 ménages ruraux et 8 groupements de transformation des filières riz, porc et huile de palme intègrent les enjeux « One Health » dans leurs pratiques.
Source: GRET
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