Ebola: en Guinée, "on espère que la sale maladie-là ne va pas durer"

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Gbowolo Kolamou est ravi de l'installation d'un nouveau centre de traitement d'Ebola à Macenta, dans le sud de la Guinée d'où est partie l'épidémie de cette fièvre en Afrique de l'Ouest. "Avec ça, on espère que la sale maladie-là ne va pas durer", dit ce jeune enseignant.

A Macenta, chef-lieu de préfecture en Guinée forestière, proche de la frontière avec la Sierra Leone, les populations ont chanté en coeur "Tous ensemble, nous vaincrons Ebola!" pour saluer l'inauguration, vendredi, de ce centre financé par la France, en présence notamment de la secrétaire d'Etat française au Développement, Annick Girardin.

Le nouvel établissement suscite l'espoir auprès des habitants de la ville (55.000 personnes) et du département (550.000 personnes) qui ont payé un lourd tribut au virus, selon le préfet de Macenta, Kémo Pascal Dembadouno.

Difficile de savoir le nombre réel de décès car beaucoup de gens sont morts sans être recensés. "On se cachait pour rester en famille", observe le préfet.

Gbowolo Kolamou, enseignant de 30 ans dont une cousine est décédée après avoir contracté le virus, "apprécie l'installation du nouveau centre" de traitement d'Ebola (CTE).

"Avec ça, on espère que la sale maladie-là ne va pas durer. Ca me soulage", confie-t-il.

L'épidémie, partie fin décembre 2013 du sud de la Guinée, a fait, depuis, 5.177 morts sur 14.413 cas enregistrés dans huit pays, essentiellement au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée, trois Etats voisins, selon le dernier bilan de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) diffusé vendredi.

A elle seule, la Guinée compte 1.166 décès sur 1.919 cas au 11 novembre, d'après l'OMS.

Avec le travail de sensibilisation et l'installation du CTE, les habitants sont "rassurés", estime Amara Camara, un chauffeur ayant perdu une fille et deux petits-enfants. Selon Gbowolo Kolamou, "avant, les gens avaient peur. Maintenant, on a compris la maladie".

Au début de l'épidémie, de nombreux Guinéens avaient peur des centres de santé qu'ils accusaient de disséminer la maladie plutôt que de la combattre.

A Macenta, des habitants s'opposant à la mise en isolement d'un des leurs par Médecins Sans Frontières (MSF) s'en étaient pris en avril à un centre de cette ONG, très active sur le terrain contre l'épidémie. Le site avait dû être temporairement fermé.

Mi-septembre, une campagne de sensibilisation dans le sud du pays avait viré au drame avec le lynchage de huit responsables locaux et journalistes, tués par des villageois.
- 'Toujours seule' -

L'isolement obligatoire des malades, les tenues "d'astronautes" du personnel soignant et la forte mortalité malgré les soins ont fait naître des rumeurs. De nombreux malades préféraient ne pas s'y rendre.

"Les gens avaient une peur bleue de fréquenter des endroits dits sanitaires", souligne Stéphane Mantion, directeur général de la Croix-Rouge française, présent à la cérémonie d'inauguration. "En plus, il y a eu une baisse de l'offre de soins" en raison des décès de personnels de santé et "des décès dus à d'autres pathologies non soignées"

Le nouveau centre, construit par MSF et qui sera géré par la Croix-Rouge, va accueillir dans des bonnes conditions malades et cas suspects en périphérie proche de la ville, sur le site qui devait être consacré à une gare routière.

Il a été conçu de manière à pouvoir également recevoir les familles des patients qui seront isolés mais pourront communiquer avec leurs proches séparés par une barrière de deux mètres, explique-t-on chez MSF.

Le CTE remplace le centre de tri installé dans l'hôpital pédiatrique de la ville sans grands moyens.

Avant, il fallait attendre les résultats des analyses avant d'envoyer les malades déclarés en ambulance à Guéckédou (sud), à deux ou trois heures de route, pour qu'ils reçoivent des soins.

Le personnel soignant et les autorités savent qu'il faut encore convaincre. Ils ont organisé samedi une journée portes ouvertes au CTE avant son ouverture effective, prévue lundi ou mardi. L'idée: montrer le fonctionnement pour ne pas générer de fausses idées.

Mais la bataille psychologique n'est pas totalement gagnée.

Pauline Mboré, 54 ans, brandit la carte d'identité délavée de sa fille, Makoura Guilavogui, 32 ans, décédée d'Ebola. "Je n'ai pas peur", assure-t-elle, "mais personne ne me rend visite dans ma maison. Je suis toujours seule".

Source: AFP

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