Débiteurs de l'Etat: Poudre aux yeux, règlements de comptes ou ruptures avec le passé?
- Par Administrateur ANG
- Le 18/02/2011 à 16:22
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Nous y voilà à nouveau. Une liste de débiteurs que l’on appelle provisoire ou partielle et qui aura donc forcément une suite que tout le peuple de Guinée attend avec la plus grande impatience.
Mais avant de décortiquer cette liste, il est important de souligner un certain nombre de facteurs pour éclairer la lanterne de nos compatriotes et poser des questions pour lesquelles les uns et les autres souhaiteraient avoir des réponses précises.
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Il faut rappeler que dans toute action concernant la gestion des biens publics et particulièrement les fonds du contribuable, il est important de mettre en place un système cohérent et surtout pédagogique pour permettre aux citoyens de mieux comprendre les enjeux et le contexte. Il ne doit s’agir nullement de présenter de boucs émissaires, seuls responsables de nos malheurs ;
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Il faut se demander si cette liste vient des fameux audits du temps de Dadis et réactualisée pour la cause. Si cela est le cas, il faudrait d’abord donner la situation de ces cadres qui avaient été impliqué dans la gestion du fonds minier et dont un est actuellement Gouverneur de la Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG) ;
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On se souvient du temps du Général Conté et dans l’affaire Etat contre Futurelec, il avait été question de savoir qui devait à qui. Dans un premier audit, le second devait au premier. Mais au terme d’un contre audit piloté par le Cabinet de l’actuel Ministre des Finances avec un coût de 200 Millions de nos Francs, on nous a dit que c’est le premier qui devait au second. Si cette liste est correcte, l’actuel Ministre des Finances devrait donc être révoqué pour incompétence et ou complicité ;
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Lorsque sur les prochaines listes, on va voir d’actuels cadres de l’Administration, faudrait-il juste leur demander de rembourser et les garder à leur poste, ou bien faudrait-il les révoquer purement et simplement pour servir d’exemple ? Il est bien évident qu’un cadre qui doit à l’Etat n’est plus en mesure de gérer objectivement un quelconque poste de responsabilité dans l’Administration ;
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Il est entendu qu’il y a des cadres qui ne sont pas encore cités et le peuple espère qu’ils seront cités dans les listes à venir. Si pour une raison ou pour une autre, ces cadres ne se retrouvent pas sur ces listes, le processus n’aura plus aucune crédibilité et on se posera la question de savoir si la volonté est réelle ou bien juste pour régler des comptes ;
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Les Guinéens se souviennent de la fameuse liste B du temps de Sidya TOURE à la Primature. Cette liste avait fait beaucoup de bruit et la liste A qui devait immédiatement suivre n’est jamais sortie pour des raisons évidentes de protection et d’existence de personnes « intouchables » déjà à l’époque ;
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Ces mêmes guinéens se souviennent aussi du cas d’un Ministre de la Jeunesse à qui il était reproché une gestion très légère des fonds publics destinés à l’entretien du Syli National lors de la CAN au Ghana. Cette affaire avait été étouffée entre copains. Le Ministre en question a été envoyé, à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) avant de se retrouver comme patron du Fonds Minier. Où en est on avec ce dossier ?
Essayons maintenant de décortiquer cette liste partielle de manière plus objective :
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Tout d’abord il faut souligner qu’il n’est pas normal de mélanger les personnes physiques des personnes morales. Il faut savoir qu’une personne morale a des responsabilités sociale et juridiques plus importantes dans la gestion d’une dette qu’une personne physique ;
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Dans les Fonds de Contrepartie, on se rend compte que près de 80% du montant en jeu est à la charge de Futurelec qui reste de nos jours le plus gros débiteur de l’Etat, en attendant de voir la situation de GUICOPRES. Il faut se rappeler donc que Mamadou Sylla est celui par qui les évènements de Janvier et Février sont arrivés avec tout ce que cela comporte comme pertes en vies humaines. Quatre ans après, cet homme a été leader d’un parti politique et candidat à la Magistrature Suprême du pays. C’est dire qu’en Guinée, il faut toujours se méfier des grandes annonces ;
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Toujours dans les Fonds de Contrepartie, nous avons la Personne Morale du nom de Tramer Guinée, un débiteur de l’Etat pour une valeur de 347 300 000 FG. Cette entité est sous le contrôle de l’actuel Ministre de la Pêche. La question qui se pose reste celle de savoir comment le Patron d’une société qui doit a l’Etat peut-il se retrouver Ministre de la République ?
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Dans la Gestion de la BCRG, il est évident que le fait de donner le nom de l’ancien Gouverneur de la Banque sans celui de son Vice, dont les largesses avaient fait de lui le « Parrain » du PUP avec le surnom évocateur de « Aldjanna Fodé », entraîne un certain nombre de questions surtout quand on a encore à l’esprit l’épisode des fameux « Bons de Caisses » de la BCRG qui avaient fait tellement de bruit à l’époque ;
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Au niveau des Audit, on nous donne les noms d’un certain nombre de cadres du Projet Coton. Là aussi, on connaît le nom d’un certain leader politique du PEDN dont on a une idée de l’implication dans la gestion des affaires de ce projet lors de son passage à la Primature. Ou bien on laisse les gros poissons pour plus tard ?
De manière générale, et depuis le temps de Dadis Camara et du CNDD, on a brandi cette idée d’audit, non pas pour faire le point de la gestion des affaires publiques à un moment donné, mais pour juste voir comment se débarrasser de certaines personnes jugées gênantes à tort ou à raison. Conséquences, tout le processus qui était bon et salutaire en soit, a été purement et simplement travesti et l’action a perdu toute sa substance.
Dans ce processus, les nouvelles autorités gagneraient beaucoup en crédibilité si :
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Il y a de la Méthode, de la Transparence et de la Pédagogie dans la gestion de tout le processus ;
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Il y a de l’impartialité dans les actions ;
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Il y a une claire distinction entre les Secteurs d’Activités ;
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Il y a aussi une distinction entre les Personnes Physiques et Morales ;
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Toutes les personnes qui doivent à l’Etat remboursent effectivement dans la transparence ;
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Toutes ces personnes sont désormais écartées de la gestion des affaires publiques ;
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La gestion du processus ne s’identifie pas à des règlements de compte comme toujours
Dans tous les cas, les guinéens prennent acte de la publication de cette liste partielle, mais restent aussi attentifs et vigilants pour la gestion de la suite.
Pour l’instant, toute la grande question de savoir si cette liste partielle suit une action d’opération « Mains Propres » ou simplement une volonté de se débarrasser de certaines personnes gênantes, reste dans toutes les têtes.
Si du temps de Dadis, l’opinion a fortement saluer l’idée et la volonté d’assainir la gestion des fonds publics, les guinéens ont tout aussi déploré le manque de sérieux, de crédibilité et de professionnalisme des cadres qui ont été commis au comité d’audit de l’époque.
Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, il est difficile de croire que l’on puisse faire des miracles avec d’anciennes méthodes pour relever de nouveaux défis.
Affaire à suivre…
Mamadou BARRY,
Analyste Financier mamadoubiro@yahoo.fr
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