Cellou Dalein Diallo: en Guinée, «nous voulons que la gouvernance soit améliorée
- Par Administrateur ANG
- Le 06/09/2016 à 08:04
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Le président guinéen Alpha Condé a reçu, jeudi 1er septembre, le chef de file de l’opposition Cellou Dalein Diallo, président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG). Les deux responsables politiques se sont déclarés favorables à des échanges réguliers, deux semaines après une manifestation d’opposants suivie de violences meurtrières.
Pourquoi cette rencontre ? Est-ce un signe d’apaisement ? La confiance entre les deux hommes est-elle rétablie ? Alpha Condé va-t-il accéder aux revendications de l’opposition, notamment la tenue d’élections locales et communales ?
RFI : Il y a un peu plus de deux semaines, vous et vos partisans manifestiez pour demander la démission d’Alpha Condé. Vous avez même dénoncé « la dictature et la mauvaise gouvernance d’Alpha Condé ». Et là, vous le rencontrez en tête-à-tête. Auriez-vous changé d’avis à son sujet en deux semaines ?
Cellou Dalein Diallo : Changer d’avis, sans doute non. Nous voulons que la gouvernance soit améliorée, que les lois de la République soient respectées et que les accords politiques qu’on a laborieusement conclus soient aussi respectés. Ce n’est pas le cas jusqu’à présent. Alors il m’a invité, en tant que chef de file de l’opposition, à le rencontrer. Je n’ai pas manqué d’attirer son attention sur les conséquences justement de cette mauvaise gouvernance qui a été particulièrement déplorable en 2015 et en 2014.
Lors de ce tête-à-tête, la tenue des élections locales et communales a-t-elle été évoquée ? Ces dernières ont eu lieu en 2010.
Oui, bien sûr. Nous sommes dans la perspective d’aller aux élections locales. Malheureusement, on s’étonne des points des accords des dialogues passés qui n’ont jamais été respectés. Monsieur Alpha Condé s’est refusé à le faire. Et ça fait partie d’une de nos revendications. Là, il a promis de faire en sorte que ces élections aient lieu.
Avez-vous parlé d’un calendrier électoral avec Alpha Condé ?
Nous avons d’abord demandé à monsieur Alpha Condé de s’engager et d’engager résolument les autres institutions de la République à appliquer les accords politiques parce qu’on a eu trois dialogues politiques qui ont été sanctionnés par des accords qui n’ont jamais été appliqués. Et lors de nos manifestations pacifiques, réprimées dans le sang, on a eu plus de 70 morts qui ont été tués à bout portant pour lesquels il n’y a jamais eu d’enquête pour identifier les auteurs des crimes. Il n’y a même pas eu de sanction administrative à l’endroit des policiers et gendarmes coupables de ces crimes. Il faut qu’on mette un terme à l’impunité. Il s’est engagé à le faire. Et nous avons aussi demandé d’indemniser les victimes. Maintenant l’organisation des élections locales aussi, ça n’a jamais été appliqué non plus. L’assainissement du fichier électoral, il faut qu’on ait un fichier qui reflète le corps électoral tel qu’il est.
Vous êtes en train de me dire qu’Alpha Condé accède ou veut bien accéder à toutes vos demandes et satisfaire vos revendications aujourd’hui ?
En tout cas, il s’est engagé à faire en sorte que tous les accords politiques de dialogue intérieur soient appliqués. Et il y avait cet engagement de la Céni, de reformer la Céni, d’organiser les élections locales, de mener les enquêtes pour identifier les auteurs des crimes commis lors de nos manifestations, il y avait l’indemnisation des victimes. Donc il s’est engagé à ce que tous les accords de politique intérieure soient appliqués, ce qui n’était pas le cas jusqu’à maintenant.
Ce sont des signes d’apaisement importants ?
Oui, dans la mesure où on espère que cette fois-ci, justement, il y aura une suite à ces engagements.
Vous allez rencontrer régulièrement Alpha Condé. Cela préfigure-t-il un rapprochement ?
Rapprochement, je ne sais pas. Ça peut contribuer à décrisper la situation. C’est-à-dire qu’il y a des problèmes qui sont posés et l’opposition n’avait pas de recours. Il n’y a pas de dialogues, il n’y a pas de rencontres entre le chef de file et la mouvance. Nous n’avions qu’un seul recours ou deux : la communauté internationale et la rue. Alors souvent la communauté internationale est restée aussi complaisante avec lui et c’est pourquoi nous utilisons souvent la rue comme on l’a fait le 16 août 2016.
Alpha Condé n’est-il pas dans une stratégie d’affaiblissement de l’opposition ? Il y a eu les ralliements de Sidya Touré (Union des forces républicaines-UFR), de Bah Oury (opposant guinéen vice-président de l'UFDG) ?
La force de l’opposition, c’est adhésion des populations. La force d’un parti, ce n’est pas ses alliances, c’est l’adhésion de la population. Et nous avons toujours montré, par les mobilisations grandioses qu’on a réussies, qu’on est avec le peuple de Guinée.
Diriez-vous aujourd’hui que vous avez un peu plus confiance en Alpha Condé ?
Cela dépendra de la suite qu’il va donner à ses propres engagements parce que c’est ça, la crise de confiance est née de l’inobservation, de la non-application des engagements qui ont été pris, et aussi parfois de la Constitution et des lois de la République. S’il engage résolument dans cette voie, naturellement il y aura décrispation, les tensions vont baisser. Puis on va peut-être aller vers une collaboration plus fructueuse pour la démocratie et pour l’amélioration des conditions de vie des citoyens.
Donc la balle est dans son camp ?
La balle est dans son camp. Nous privilégions, nous préférons le dialogue à la rue parce que dans la rue, on a perdu plus de 70 militants qui ont été tués dans ces manifestations pacifiques. S’il y a un dialogue, nous préférons aplanir nos divergences autour de la table que d’aller dans la rue. Mais s’il n’y a pas de dialogue, de bonne foi, naturellement les manifestations pacifiques, qui constituent un droit consacré par la Constitution, seront utilisées.
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