Alpha Condé sur tous les fronts avant l’élection
- Par Administrateur ANG
- Le 22/01/2015 à 15:09
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« En 2015, nous allons dégager Alpha Condé. » Changement de ton et de méthode chez le leader de l’opposition Cellou Dalein Diallo. Le président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) durcit son discours à l’encontre du chef de l’Etat Alpha Condé, et appelle à la « désobéissance civile » et à la poursuite des manifestations.
Même si elles se veulent pacifiques, ces marches et meeting donnent néanmoins lieu à des affrontements violents entre les opposants au président Alpha Condé et les forces de l’ordre. Le 7 janvier, une dizaine de personnes ont été blessées par balles, dont des gendarmes. « Des manifestants s’interrogent. Faut-il continuer à manifester à main nue ? S’armer ? », rapporte un membre actif de ce mouvement de protestation. Dans l’opposition comme dans les rangs du Rassemblement pour la Guinée (RPG, parti au pouvoir), on redoute un embrasement en cette année électorale.
Bras de fer entre l’opposition et le pouvoir
La commission électorale nationale indépendante (Ceni) n’a pour l’instant pas proposé de date pour la tenue de cette deuxième élection présidentielle libre de l’histoire. « Il n’y a pas de raison que nous décalions le calendrier électoral », confiait fin novembre au Monde, le Président Alpha Condé, élu en 2010. Ce calendrier table sur une élection présidentielle en octobre. Mais l’opposition se montre intransigeante : elle exige notamment une recomposition de la Ceni, jugée acquise à l’exécutif, un recensement des électeurs et l’organisation au préalable des élections communales et locales sans cesse reportées depuis quatre ans.
Entamé en juillet 2014, le dialogue entre le pouvoir et l’opposition n’a pas avancé d’un iota. Les portes du palais présidentiel de Sékhoutouréya ne se sont pas entrouvertes aux bouillonnants caciques de l’opposition qui s’estiment trahis. « L’opposition a trop d’exigences. Alpha Condé ne pourra pas tout concéder. Mais il se devra d’éviter la confrontation et l’embrasement. L’exercice est délicat », analyse un membre de son gouvernement.
« Nous sommes obligés de recouvrir à la rue pour faire entendre nos revendications. On paie le prix cher : 57 de nos jeunes ont été tués à bout portant depuis 2011 », s’insurge Cellou Dalein Diallo, depuis Conakry. « Je redoute une escalade, car je ne vois pas de volonté politique d’apaisement. Et nous continuerons nos marches jusqu’au bout », ajoute le candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2010 qui entend bien prendre sa revanche.
A l’aube de cette année électorale cruciale, la scène politique guinéenne demeure polarisée à l’extrême entre des partis qui recrutent essentiellement sur la base ethnique. Les Peuls restent unis derrière « Cellou » et les Malinké en bloc derrière le RPG d’Alpha Condé - renforcé par une victoire (47 % des voix obtenues contre 30 % pour l’UFDG) aux législatives de septembre 2013, organisées avec trois ans de retard. L’autre leader de l’opposition, Sidya Touré, à la tête de l’Union des forces républicaines (UFR) jouit d’une popularité parmi les Soussou tout en entretenant son influence à Conakry et en Guinée forestière, épicentre de l’épidémie Ebola, déclenchée en décembre 2013.
« En guerre contre Ebola »
« Pour le moment, ce ne sont pas les élections qui constituent ma priorité, ni les déclarations des uns ou des autres. Ma priorité absolue, c’est Ebola et les conséquences dramatiques au niveau humain, économique et social », confie Alpha Condé lors d’une escale à Paris le 19 janvier, avant de rejoindre le Forum économique de Davos. « Plusieurs millions de dollars de contrats miniers ont été suspendus à cause d’Ebola, ce qui affecte notre économie. Je ne suis pas en campagne mais en guerre contre Ebola », poursuit-il.
La quasi-majorité des sociétés minières étrangères ont suspendu leurs activités d’exploitation ou d’exploration, et ont évacué, leur personnel, déplore le ministre des mines Kerfalla Yansané. Pour tenter de revaloriser ce secteur qui contribue à hauteur de 30 % au PIB, et de rééquilibrer le rapport de forces avec les géants miniers, Alpha Condé avait fait de la révision du code minier une priorité de son premier mandat. Il s’est ainsi entouré d’experts tels que le milliardaire américain Georges Soros, l’ancien premier ministre britannique Tony Blair ou encore de son « ami », l’ancien ministre des affaires étrangères français, Bernard Kouchner. Toutefois, la fièvre hémorragique qui a fait 1 869 morts en Guinée a aussi contaminé l’économie. Alpha Condé se prépare à une croissance de 0,5 % contre 4,5 % initialement prédit par la Banque Mondiale qui chiffre à 540 millions de dollars le coût d’Ebola en Guinée. Certains prédisent une récession.
Cette situation économique délicate fait le miel de l’opposition qui ne manque pas d’attaquer aussi sur ce front. Ancien Premier ministre sous Lansana Conté, Sidya Touré, qualifie Alpha Condé de candidat du « déclin national ». À Conakry, où les habitants souffrent toujours des approvisionnements erratiques en eau et en électricité, « les hôtels sont fermés ou vides, les commerces ont les stores baissés et l’activité est au ralenti », déplore le chef de l’Etat, déterminé à rétablir la confiance avec les investisseurs durant son séjour à Davos.
« Il n’a pas vraiment de bilan pour le moment et c’est donc cette année 2015 que tout va se jouer », veut croire un de ses ministres pour qui la mise en service à temps du barrage hydroélectrique de Kaléta (près de Kindia, en Guinée maritime), annoncée en juin, sera déterminante. « Il pourra au moins dire, je vous ai ramené l’électricité ! ».
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