A J+10, Matoto, première circonscription de Guinée, attend encore les résultats des législatives
- Par Administrateur ANG
- Le 07/10/2013 à 21:12
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Dix jours après les législatives du 28 septembre, un fastidieux décompte des votes se poursuivait lundi à la mairie de Matoto, quartier populaire de Conakry et première circonscription électorale de Guinée, que l'opposition dit avoir remportée.
Avec plus de 800 bureaux de vote et quelque 440.000 électeurs inscrits, Matoto pourrait envoyer, en fonction du taux de participation, entre six et neuf députés au Parlement, qui en compte 114. Assis sur des chaises en plastique dans la cour de la mairie, le président de la Commission administrative de centralisation des votes (CACV) attend en ce lundi matin, avec son vice-président et un assesseur, l'arrivée des représentants des partis. "On avait dit 09H30 mais on a fini à 05H30 ce matin...", explique Victorien Rahba, magistrat de profession, passant et repassant un rasoir jetable sur son menton. Devant le bâtiment sont empilées des urnes transparentes. La porte d'entrée est cadenassée. Après trois quarts d'heure d'attente, "on peut y aller", lance M. Rahba: un représentant de l'opposition vient d'arriver. La grande porte est ouverte. Derrière, dans les couloirs et les étages, encore des urnes: 1.600 au total, le scrutin ayant nécessité deux votes - l'un uninominal, l'autre à la proportionnelle. Dans la grande salle au 1er étage, bouteilles de soda vides et petits sachets d'eau sont éparpillés sur le sol. Des centaines de grosses enveloppes kraft et des milliers de procès-verbaux sous pochettes plastique sécurisées sont entassés le long des murs. "Ca a été très long parce que le décompte est manuel, et c'est compliqué avec toutes ces enveloppes qui arrivent en quatre exemplaires pour les différentes institutions. Et ensuite, dans les sous-enveloppes, il faut trouver les deux procès-verbaux par bureau", un pour le scrutin uninominal, l'autre pour la proportionnelle, explique M. Rahba, homme massif en strict costume noir. "Certains ont joint leurs procès-verbaux, d'autres les ont envoyés séparément, tout est arrivé en vrac", se lamente Antoine Koulé-Cé, rapporteur de la Commission électorale communale indépendante (Céci).
"Les gens ne savaient pas, c'est la première fois qu'on vote comme ça avec deux scrutins, alors ça a créé la confusion", dit-il.
Retrouver les PV
A tel point qu'une fois le dépouillement terminé, les commissaires se sont aperçus qu'il leur manquait les PV d'une soixantaine de bureaux...
"On savait bien qu'ils devaient être là quelque part...", dit M. Koulé-Cé en montrant les milliers de pochettes et enveloppes entassées. "Il fallait juste les retrouver !".
Alors, il a fait venir des renforts et "on a cherché, on a fouillé, par terre, jusqu'à 05H30 du matin... On en a déjà retrouvé une cinquantaine, on va continuer...", dit-il, sa casquette blanche inclinée sur le côté.
Ici comme sur l'ensemble des cinq communes de Conakry, l'opposition dit avoir gagné l'élection, tant au scrutin uninominal que proportionnel.
A Matoto, "il n'y pas vraiment de contestation, tout au plus quelques échanges de vues", dit en riant l'assesseur de la mouvance présidentielle, Sadigui Diakité. "D'ailleurs, on a eu des observateurs tout le temps avec nous".
A leur arrivée, les deux observateurs européens confessent une grande fatigue mais refusent de s'exprimer sur le fond des opérations.
Selon un diplomate, "à Matoto, les procédures ont été bien suivies, le travail est fait sérieusement, avec rigueur".
El Hadj Mamadou Diallo, représentant de l'Union des Forces démocratiques de Guinée, le principal parti d'opposition, explique que "ça dure parce que c'est la plus grande commune de la République".
Lui aussi estime que le problème des PV manquants est dû à une mauvaise organisation et non à une volonté délibérée. Coiffé d'un "pouto" brodé, le chapeau traditionnel peul, il s'excuse d'être arrivé en retard mais, dit-il, "quand je suis rentré chez moi, les gens sortaient de la mosquée" à 06H00. "Et c'est comme ça depuis plusieurs jours !"
Après la phase de dépouillement, "il faut qu'on compile les résultats enregistrés par bureau de vote", explique le président Rahba, montrant un grand registre où les colonnes de chiffres, inscrites à la main, se succèdent sur des dizaines de pages. Et il ajoute: "les résultats seront transmis ce soir, s'il plaît à Dieu".
Par Anne LE COZ
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